3 ème  année de l’Institut d’études politiques de Bordeaux, 2000.

 

 

 

 

 

 

MEMOIRE DE STAGE

 

sous la direction de monsieur Hubrecht

 

*****

 

Le Plan lumière
de la ville de Bordeaux

 

- Réalisation et enjeux -

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Stage effectué au service de l’éclairage public et des mises en lumière de la ville de Bordeaux

 

sous la direction de madame Bibes-Froment

 

 

 

 

 

 

 

 

 

REMERCIEMENTS

 

 

 

            Je tiens à remercier monsieur Crombé, Directeur général de la Direction générale de l’aménagement urbain de la ville de Bordeaux, de m’avoir accueilli au sein de ses services .

Je souhaite également remercier monsieur Dulout, Directeur du service de l’éclairage public et des mises en lumière, ainsi que ses techniciens, messieurs et mesdames les responsables des autres services que j’ai pu rencontrer, MM. Kamlay et Prévôt de l’Office de tourisme de Bordeaux, monsieur le conseiller municipal Jean-Dit-Cazaux chargé des mises en lumière et du patrimoine, de leur aide précieuse.

Enfin, je remercie tout particulièrement madame Bibes-Froment d’avoir bien voulu m’accompagner et me guider tout au long de mon passage au sein des services techniques.


 

                       SOMMAIRE                        .

INTRODUCTION.. 1

PREMIERE PARTIE.. 3

LA REALISATION DU PLAN LUMIERE DE BORDEAUX : QUELLE AMBITION POUR QUELLE MOTIVATION ?  3

Section I :  LA NECESSITE DU PLAN LUMIERE. 3

A/ La place des mises en lumière. 4

1. Une importance dans les équipes. 4

2. Le cadre du Projet urbain pour la mise en place d’un projet ambitieux. 6

B/ Le dépassement du strict aspect sécuritaire. 8

1. Des exemples empruntés ailleurs en France ou en Europe. 9

2. L’appropriation pour Bordeaux : un lien à la volonté de la nouvelle municipalité dans l’idée d’une problématique particulière. 9

a. L’origine. 9

b. L’enjeu d’une redéfinition de la ville. 10

- Dans la structure et la hiérarchie : vers le qualitatif au service de l’aménagement urbain. 10

- Dans la qualité visuelle pour la mise en valeur 12

c. La qualité et les propriétés de l’éclairage. 13

Section II : LES MOYENS MIS EN PLACE POUR LES REALISATIONS.. 15

A / Les outils pour la mise en place du Plan lumière. 15

1. Le schéma directeur d’aménagement lumière (SDAL). 16

a. La première partie du SDAL : l’analyse de l’existant 17

b. La seconde partie du SDAL. 19

2. Le Plan lumière. 22

3. La charte lumière. 22

B/ La concrétisation de la mise en place du Plan lumière. 24

1. Une réalisation dans un champ large de cohérence. 24

2. Les critères pris en compte pour la réalisation du Plan lumière. 25

3. Le déroulement d’une mise en lumière. 27

SECONDE PARTIE.. 31

LES APPORTS ET LES ENJEUX DU PLAN LUMIERE POUR BORDEAUX : UNE POLITIQUE SYMBOLIQUE OU REELLEMENT INNOVANTE ET FONCTIONNELLE ?. 31

Section I :  Le Plan lumière comme ELEMENT symbolique. 31

A/ La révélation du nouveau maire par une action sur l’image. 32

1. La mise en place intéressée du Plan lumière. 33

2. Le choix judicieux des premières réalisations : l’image affichée d’un changement avant la réalisation concrète des mesures lourdes du Projet urbain. 36

B/ L’aspect symbolique de la réhabilitation du patrimoine redécouvert à la lumière des réalisations : une séduction pour les habitants. 39

1. Vers la ré-appropriation de la ville par ses habitants grâce à la nouvelle image crée par le Plan lumière et promue par certaines animations de proximité. 40

2. La redécouverte du patrimoine pour rendre la ville plus agréable et pour séduire les habitants. 42

3. La reconnaissance de la réussite de la réhabilitation du patrimoine par la lumière. 45

Section II : Une véritable politique annexe.. 46

A/ La lisibilité et le re-dimensionnement de la ville. 47

1. L’aspect nécessaire de l’inscription du Plan lumière dans d’autres projets de réhabilitation. 47

a. La réhabilitation de certains quartiers dans un but de ré appropriation et de requalification. 47

b. Le cadre de la cohérence du Projet urbain global pour une nouvelle pratique de la ville. 49

2. L’aspect qualitatif d’une perspective de la ville et des quartiers dans une vision complémentaire de nuit. 50

B/ Le standing et l’embellissement. 53

1. Vers une politique touristique. 54

2. L’aspect économique par la recherche d’investisseurs. 57

3. La reconquête des centres pour l’habitat. 58

CONCLUSION.. 60

ANNEXES. 62

BIBLIOGRAPHIE.. 63

Ouvrages : 63

Catalogue d’exposition : 63

Documents, revues et presse : 63

 


 

INTRODUCTION

 

 

            A l’aube de l’an 2000, plus encore que les autres années, les villes vont se parer avec les fêtes de leurs plus beaux habits de lumière.

            Car en effet, l’éclairage public ne consiste pas seulement à mettre de la lumière pour éclairer des zones que l’on trouve trop sombres aujourd’hui. L’arrivée progressive des techniques a permis de pouvoir progressivement toujours améliorer la qualité de l’éclairage, au début à l’aide de lampadaires utilisant des becs de gaz, puis s’étant par la suite modernisée en fonction des apports des nouvelles techniques, comme l’électricité. Et les techniques encore plus modernes permettent plus que de mettre en lumière, réaliser une véritable dramaturgie de l’espace. C’est ce qui fait qu’il a toujours existé un service de l’éclairage public dans les villes pour pouvoir permettre l’application des nouvelles techniques.

Mais aussi, le pouvoir de police du maire est concerné par l’éclairage à un titre essentiel : la sécurité sur la voie publique qui nécessite un bon éclairage de celle-ci. C’est ce qui justifie la conservation de la compétence en faveur de la commune. Toutefois, certaines raisons comme la gestion du domaine public de la voirie, assurée par la communauté urbaine de Bordeaux, peuvent justifier un transfert de compétences vers cette dernière autorité. Mais si l’éclairage garantit avant tout la sécurité, il n’en demeure pas moins qu’il dispose d’un contenu environnementaliste et esthétique[1].

            C’est à ce titre que Bordeaux, comme nombre de villes de même taille, ou de taille plus modeste, ont décidé de mettre en place un plan lumière afin de contribuer à la mise en place d’une meilleure qualité d’éclairage grâce aux nouveaux procédés, ce qui a nécessité de repenser la totalité de l’éclairage ainsi que de contribuer à la mise en place d’un programme de mises en lumière, avec le suivi des services municipaux et l’inscription dans le Projet urbain.

 

            Ainsi, lors de mon stage au sein des services techniques de la ville de Bordeaux, j’ai pu apprécier durant un mois l’action de la municipalité dans la mise en place du Plan lumière. Nous allons donc essayer de comprendre quelle est l’importance du Plan lumière dans l’ambition de la réalisation au travers de la motivation des différents acteurs, avant d’engager une évaluation des apports, et ainsi tenter d’apprécier si cette politique mise en place relève du symbolique ou si elle est réellement innovante et positive.


 

PREMIERE PARTIE

LA REALISATION DU PLAN LUMIERE DE BORDEAUX : QUELLE AMBITION POUR QUELLE MOTIVATION ?

 

 

            Le Plan lumière de la ville de Bordeaux coïncide avec la mise en place du Projet urbain pour la ville de Bordeaux, réalisé en octobre 1996 : global et cohérent, ce dernier intègre également une dimension liée à l’éclairage public et aux mises en lumière. Ceci correspond à une nouvelle préoccupation des décideurs publics qui ont compris la nécessité de considérer un aménagement d’un projet urbain de jour, mais aussi de nuit, correspondant à la vie des quartiers et à celle de l’agglomération de Bordeaux.

            En effet, si l’éclairage public dispose déjà des techniques récentes, la volonté de le repenser en intégrant de nouvelles propriétés et de nouvelles conceptions a justifié la mise en place d’un Plan lumière, intégré dans le Projet urbain.

            Ainsi, si une telle entreprise a semblé être nécessaire notamment par une certaine prise de conscience des décideurs publics, elle a pu être mise en œuvre par des outils appropriés permettant de mettre en place un programme déterminant l’orientation que l’on veut donner en la matière.

 

Section I :  LA NECESSITE DU PLAN LUMIERE.

 

            L’opportunité de la mise en place du Projet urbain ainsi que de l’arrivée de nouvelles ambitions ont permis de donner un intérêt certain pour la mise en place d’un Plan lumière.

            L’élaboration du Plan lumière s’inscrivant dans la politique générale de la ville de Bordeaux, nous tenterons donc d’apprécier l’importance de la place accordée au Plan lumière dans le projet urbain global, ce qui pourra nous permettre de rechercher son origine et ce qui est attendu de lui.

 

A/ La place des mises en lumière.

 

            Il s’agit de comprendre dans quelle mesure la place des mises en lumière peut s’apprécier tant dans les équipes que dans la place qui lui est accordée dans la mise en place du Projet urbain, car l’éclairage public et les mises en lumière s’inscrivent dans la conception de ce projet urbain, issu de la volonté politique du maire. En effet, la Direction générale de l’aménagement urbain (DGAU) a été créée dans sa forme actuelle par le maire trois mois après les élections municipales de mai 1995, et le Projet urbain a été engagé un an après.

1. Une importance dans les équipes.

            La direction des espaces publics et des déplacements urbains, c’est-à-dire l’une des quatre sections à composer la DGAU, a été modifiée dans sa forme avec le changement d’équipe dirigeante, et est subdivisée en trois services, regroupés au Pôle technique municipal, le service des espaces verts se situant au Palais de Rohan, c’est-à-dire à l’Hôtel de ville :

- le service de la voirie (ou des déplacements urbains et de la programmation)

- le service des espaces publics (qui lui est nouveau)

- le service des mises en lumière qui s’ajoute au service de l’éclairage public, et est composé d’un comptable, d’un ingénieur chef, M. Dulout, de techniciens[2] ainsi que d’une chargée de mission, madame Bibes-Froment, qui est chargée de l’aspect esthétique des réalisations, mais aussi du lien avec les élus, le cabinet, les concepteurs en source, du respect du Schéma directeur d’aménagement lumière et de donner des idées (comme les petits événements lumière). C’est donc à ce dernier service que j’ai été affecté à l’occasion de mon stage.

            Par ailleurs le personnel a été renforcé et les équipes ont été structurées de façon à ce que de petites unités travaillent en cohérence avec le projet urbain. Le fait de pouvoir rencontrer les différents acteurs m’a permis de comprendre que le travail se fait en interaction entre les différents services de cette direction, du fait des missions et des objectifs attribués.

            Car au-delà, une unité aménagement urbain permet une réflexion sur l’ensemble de la ville. Avec la volonté de travailler conjointement, avec des concertations et une démarche commune, par l’intermédiaire d’un projet comme objet d’étude il est possible de se lancer dans un plan d’action dès lors que différents services sont concernés : en effet la gestion se fait par ceux qui conçoivent, qui réalisent et qui exploitent.

 

            C’est donc dans ce cadre-là que travaille l’équipe de M. Dulout. Il est à juste titre le principal acteur concerné par la mise en place du Plan lumière, même si celui-ci ne concerne qu’une faible part de son activité, mais son action doit se faire conjointement avec les différents autres services dans le but de contribuer à la cohérence souhaitée.

 

            Les missions essentielles qui ont été confiées à la direction des espaces publics et de l’aménagement urbain sont ainsi entre autres de développer une politique qualitative des espaces publics en agissant sur les lieux emblématiques, le mobilier, l’éclairage, l’embellissement de la ville et sa cohérence, de réussir l’arrivée du tramway en réorganisant les déplacements urbains ou encore d’améliorer les accès au centre-ville. Par ailleurs les objectifs poursuivis sont entre autres de définir et de mettre en place rapidement un traitement global et cohérent des espaces publics à partir de nouvelles méthodes de travail appliquées sur le réaménagement des places ou encore de mettre en œuvre le Plan lumière triennal en optimisant plus encore les opérations de réhabilitation du réseau d’éclairage public.

            Le Plan lumière est donc réalisé conjointement à d’autres objectifs, et s’inscrit donc à ce titre dans le Projet urbain de la ville.

2. Le cadre du Projet urbain pour la mise en place d’un projet ambitieux.

            Bordeaux aspire donc, au travers d’un projet urbain global et fort[3], à tenter de donner une nouvelle image plus représentative de la ville, en soulignant ses atouts propres correspondant mieux à son ambition et à sa dimension outre de métropole régionale, de ville d’envergure européenne. L’ambition qu’elle veut réaliser est donc à son image, mais peut aussi s’inscrire dans une perspective de “ rivalité ” avec d’autres villes d’égale importance. De nombreuses mises en lumière ont en effet été très réussies, comme à Lyon, Paris, Le Mans, Caen, Strasbourg, …

 

            Il existe trois volets dans le Projet pilote urbain : celui concernant la requalification urbaine, celui sur la re-dynamisation économique, et celui sur le développement social et culturel.

Le Plan lumière s’inscrit dans le premier volet, au même titre que la ré-appropriation des quais, la recherche programmative pour la reconversion des hangars au bord des quais, la réhabilitation du quartier des Chartrons, le parc des Berges, le ravalement et la réhabilitation des immeubles, la réhabilitation des bassins à flot, etc.

 

            Du Schéma directeur d’aménagement urbain général, l’on passe donc à des déclinaisons plus sectorielles, comme le Schéma directeur d’aménagement lumière, sur lequel est conçu le Plan lumière, afin de cibler au plus juste les décisions à prendre. De la lumière au tramway, le maillage des axes se superpose pour structurer les forces du développement urbain à venir. Les différents programmes se font donc conjointement. Ainsi, dans la dimension du projet urbain, Bordeaux veut mettre en valeur ses avantages propres tels que la richesse de son patrimoine, mais aussi vitaliser l’axe Bacalan-Bastide-Belcier, le long des quais, ainsi que l’axe est-ouest, avec le franchissement du fleuve[4].

 

            Mais ce n’est pas la seule contribution du Plan lumière au Projet urbain. En effet le Plan lumière est aussi pris en compte dans la dimension patrimoniale, permettant ainsi de réhabiliter les lieux liés à l’identité bordelaise. Car il est avéré que Bordeaux recherche toujours plus la propreté, ou une meilleure gestion de la proximité. “ Elle doit aujourd’hui donner l’exemple avec les biens dont elle a la charge ”, comme l'annonce le maire dans la présentation du Projet urbain, en octobre 1996. C’est ainsi à ce titre que le Plan lumière a aussi été mis en place, avec l’inventaire du patrimoine, l’encouragement à la réhabilitation des architectures traditionnelles, l’aménagement d’espaces publics, la restauration des bâtiments historiques,... Et ceci d’autant plus que Bordeaux a signé avec le Ministère de la culture un protocole d’accord pour se placer comme ville de référence européenne en matière de mise en valeur et de respect du patrimoine, intégrés aux projets urbains de la cité.

 

            C’est donc dans ce cadre-là qu’entre la mise en place du Plan lumière : sa dimension semble être à la hauteur des ambitions de la nouvelle équipe municipale. Il est comme une manière de “ donner à voir ”, il est comme la plus simple et la moins chère façon de faire comprendre le projet urbain dans sa totalité, tant sa mise en place se calque sur les atouts de la métropole régionale, c’est-à-dire le patrimoine et sa nécessaire mise en valeur, et les axes forts. Son influence se produit au quotidien pour les habitants mais permet également de séduire les étrangers. Mais aussi la mise en place du Plan lumière peut se faire sur un temps court, par une action d’incitation, selon un calendrier envisagé : ainsi il possède sa cohérence propre dans le cadre du Projet urbain. Par sa réalisation il est donc possible de deviner la volonté politique et l’envergure que l’on veut donner au Plan lumière

            L’ambition des réalisations actuelles est de passer d’une phase d’initiation à une terminaison d’un noyau dur de réalisations. A terme, l’on veut rendre une ville plus lisible, plus conviviale et plus sûre à travers l’éclairage public, mais aussi une ville plus patrimoniale. Révéler et réveiller le patrimoine tant public que privé de la ville afin d’embellir le paysage nocturne, se réapproprier la cité afin de reconquérir une légitime fierté, recomposer la silhouette urbaine de Bordeaux la nuit en tentant de lui conférer le rang de capitale régionale, renouveler un éclairage vieillissant afin d’assurer une certaine animation et mise en valeur nocturne, ce qui constitue une nouvelle priorité, voilà la place du Plan lumière. Les objectifs ambitieux et leur inscription dans le cadre du Projet urbain, l’importance de la tâche à accomplir, et les délais de réalisation assez courts justifient à eux seuls la mise en place du Plan lumière. D’autre part, sa spécificité est de pouvoir s’appuyer sur l’existant, donc sur les avantages absolus qu’il s’agit de valoriser.

            Le Plan lumière est un élément qui permet de faire du Projet urbain un projet complet et participe ainsi à développer les atouts d’une ville comme Bordeaux. Il permet de jouer sur de nouvelles fonctionnalités et propriétés attribuées à la lumière, à savoir considérer que la lumière n’est pas vouée à un seul intérêt sécuritaire.

 

B/ Le dépassement du strict aspect sécuritaire.

 

            Jusqu’au début des années 1980, l’activité de Bordeaux était essentiellement tournée vers son port. Avec la fin de l’activité de celui-ci, Bordeaux a dû se tourner vers d’autres activités, à commencer par la redécouverte d’elle-même. La priorité n’est donc pas de mettre en valeur de nouvelles infrastructures destinées à un aspect utilitaire, mais bel et bien de tenter de se re-concentrer sur des avantages propres qu’il s’agit de redécouvrir ou d’entretenir. Ainsi, a-t-on pris conscience de la nécessité de restaurer des monuments anciens, de ravaler des façades, mais aussi la mise en place de l’éclairage entre dans cette finalité-là. Par le Plan lumière, la nuit pourra être magnifiée par une mise en valeur subtile du paysage bâti : ainsi les Bordelais et les touristes pourront (re)-découvrir la ville, son patrimoine, ses espaces publics, son fleuve, tout en ayant une sécurité garantie. Mais aussi l’on peut dessiner la ville de demain, que l’on représente axée sur le fleuve. Des réussites remarquables dans certaines villes ont pu permettre à Bordeaux de voir quelle pourrait être l’application de telles mesures, et ainsi de voir comment la lumière ne revêt pas un seul aspect sécuritaire : du seul intérêt de se déplacer la nuit en sécurité au début, l’on est passé à l’éclairage comme composante importante dans l’activité sociale, culturelle et économique des collectivités[5]. Le Plan lumière permet donc à la ville non seulement d’être plus belle, mais en plus d’être plus sûre.

1. Des exemples empruntés ailleurs en France ou en Europe.

            Prioritairement, le service de l’éclairage public est destiné à offrir la sécurité lors des déplacements de nuit à la population. Il s’agit du service public minimum en cette matière. Mais très vite, Bordeaux comme les autres villes a compris l’intérêt, dans le but de dynamiser la ville et son image, de tenter de renouveler ce service afin de se doter de moyens plus importants afin de rendre la ville plus sûre, plus belle, tant de jour par la qualité et la beauté du mobilier urbain, que de nuit par la qualité de l’éclairage public, par la réussite d’un éclairage d’ambiance, ou encore par la mise en valeur de bâtiments et d’édifices remarquables. Des villes comme Barcelone sont des références pour la qualité qu’elles ont apportées en la matière. D’autre part, la capitale de la Catalogne, honorée pour son avant-gardisme, a en outre eu la possibilité de se re-dynamiser par un réaménagement de certaines artères notamment par la “ coulée verte ” des Ramblas débouchant vers le port, mais aussi par l’accueil des Jeux Olympiques en 1992, ce qui a contribué à une fabuleuse promotion de la ville. Mais Lyon ou Marseille par exemple se sont aussi lancées dans la mise en place de mises en lumière. Ces réussites et ces entreprises font que Bordeaux aussi emboîté le pas.

 

2. L’appropriation pour Bordeaux : un lien à la volonté de la nouvelle municipalité dans l’idée d’une problématique particulière.

a. L’origine

            Pour ce qui est de la ville de Bordeaux, le Plan lumière est une idée du maire, datant de sa campagne électorale pour les élections municipales de juin 1995. En effet, attaché plus à la mise en valeur de la ville qu’à la création de nouvelles infrastructures, et par l ‘intermédiaire d’un effet de mode, il a souhaité mettre en place un ravalement intensif de bâtiments remarquables, une mise en lumière de monuments tant religieux que civils, ainsi que la mise en place d’un éclairage public de qualité: il a donc porté un souci tout particulier à la mise en valeur nocturne de la ville, et notamment de tous les points remarquables comme points d’accroche, incontournables pour le visiteur et significatifs pour la population. Ainsi, c’est à partir de l’effet choc de l’éclairage de la place de la Bourse, chef d’œuvre de la ville, que les mises en lumière se sont diffusées.

            “ Par le Plan lumière que j’ai souhaité, il ne s’agissait pas d’illuminer la ville pour faire oublier la nuit, mais bien de magnifier la nuit par une lise en valeur subtile du paysage bâti. Le Plan lumière, c’est la possibilité pour les Bordelais et les visiteurs de visiter la ville, attentive à la protection du patrimoine, de ses espaces publics, de son fleuve, l’éclairage public étant prioritaire dans chaque projet. C’est ainsi pour tous, la garantie d’une plus grande sécurité, tout en dessinant la ville de demain ”, explique Alain Juppé.

            Par la présentation ainsi faite par  le maire l’on peut constater tout l’attachement qu’il porte à sa réalisation.

b. L’enjeu d’une redéfinition de la ville
- Dans la structure et la hiérarchie : vers le qualitatif au service de l’aménagement urbain.

            La nécessité de “ remettre à plat ” l’éclairage public ne pouvait s’accompagner que de la mise en place d’un programme d’ensemble. L’envergure est de taille, car il existe 25 000 points lumière à Bordeaux.

            Il s’agit d’intégrer le fait que la fonction strictement utilitaire, fonctionnelle ou parcellaire de la lumière, c’est-à-dire qui ne soit pas vue dans une perspective d’ensemble ou bien due au hasard, est reléguée au passé des années 1970 : l’éclairage était fonctionnel et standardisé pour des raisons de maintenance, et essentiellement consacré à la circulation automobile. Mais bien entendu la fonction sécuritaire reste présente, sur la voirie ou dans des zones pavillonnaires, et exclusive sur les seuls grands axes consacrés uniquement aux déplacements automobiles.

            Aujourd’hui on accorde une autre dimension sensible et émotionnelle, pouvant jouer sur la qualité de la vie ou permettant de donner une certaine atmosphère aux lieux étudiés : l’on s’oriente vers le piéton, usager de la voirie. L’éclairage commence ainsi à créer des ambiances.

            Afin de pouvoir élaborer ceci, les décideurs publics peuvent utiliser une méthodologie mise en place par les concepteurs lumière : le Schéma directeur d’aménagement lumière (ou SDAL), qui s’applique à la ville ou aux sites intérieurs, jusqu’à la création de mobilier ou de luminaires spécifiques. Ainsi l’on veut mettre en place une ville nocturne conceptualisée en fonction des divers projets d’aménagement et non considérée comme un ensemble de points lumineux, l’idée étant par ailleurs de limiter une cacophonie nocturne due à un éclairage terne et sans dimension ou encore due à la trop grande quantité d’enseignes et d’affiches lumineuses tapageuses. Ainsi peut-on aboutir à recomposer petit à petit une certaine qualité dans la nuit urbaine. En effet, l’on peut penser avec M. Narboni, concepteur lumière de nombreux SDAL, et qui a été choisi par la municipalité bordelaise, que “ la lumière est un matériau majeur de l’espace, capable de modeler et de composer un territoire nocturne générateur de convivialité. Elle peut créer une dramaturgie de l’espace, permettre de mieux appréhender la structure historique de la ville pour en recoudre de manière impalpable les déchirures spatiales encore trop fortement ressenties ”. D’autant plus que selon lui “ chaque ville, chaque site a sa propre problématique ”.

            Symboliser les axes majeurs, redécouvrir le fleuve, définir les trajectoires nocturnes autour du tramway, revitaliser certains quartiers défavorisés ou encore mis dans l’ombre; créer un effet sur les habitants, qui soit de la fierté ou de la considération, tout comme sur les touristes et voire les entrepreneurs, voilà qui concrétiserait réellement l’ambition des concepteurs du Plan lumière bien sûr dans le cadre du Projet urbain de la ville de Bordeaux. Ceci sera concrétisé par la réalisation d’une trame nocturne de la ville caractérisée, hiérarchisée et ponctuée d’édifices remarquables, dans une perspective non mitée. Ainsi la lumière pourra  a sa façon redessiner la ville en jouant sur des potentialités à développer, sur la vitalisation des atouts ainsi que par des mises en perspective. L’artistique doit donc s’allier à l’aspect technique pour que la magie s’opère pleinement. La composition du service des mises en lumière de la ville de Bordeaux témoigne donc de ceci.

            Si Bordeaux veut sortir de sa léthargie, de sa réputation de “ belle endormie ”, peut-être que l’élaboration d’un Plan lumière permettra de suffire à la réveiller. Le tout est de savoir quelles sont les priorités à établir pour contribuer à la réussite de cette entreprise.

- Dans la qualité visuelle pour la mise en valeur

            Selon M. Dulout, en règle générale, l’on cherche à embellir par les mises en lumière, en commençant par ce qui est le plus notable, à savoir par les bâtiments publics, car par ailleurs le fait de trop tarder dans les réalisations pour ce domaine-là peut conduire à un certain blocage. D’ailleurs, le Plan lumière s’est développé essentiellement dans sa dimension patrimoniale. La lumière est ainsi considérée comme un véritable outil de mise en scène. L’on peut même parler de scénographie, par la possibilité de faire ressortir les éléments remarquables tout en dissimulant dans l’ombre les éléments moins valorisants : tout se fait donc en mesure de l’éclairage, de la colorimétrie, ou des jeux d’ombres et de lumière. Et dans un niveau plus global il convient de respecter des règles générales afin de permettre d’assurer une certaine cohérence, notamment dans l’ancienneté ou le style de l’édifice. L’éclairage peut donc contribuer à faire redécouvrir des bâtiments pouvant être sans intérêt le jour, et à créer des paysages nocturnes pouvant rendre la ville agréable dans son aspect nocturne, à l’image de Barcelone. Mais il faut toutefois éviter de tomber dans un excès d’éclairage : trop illuminer peut en effet effacer les effets de la lumière. Il convient donc d’être mesuré et de traiter les sites en fonction de la sensibilité que l’on veut leur donner (en donnant un aspect mystérieux ou imposant), donc créer une ambiance tout en limitant les agressions visuelles. L’on peut ainsi créer un habillage lumineux qui soit guidé et accompagné autour de thèmes clés comme le fleuve, le patrimoine historique, les parcours de nuit, avec par exemple la collaboration de l’Office du Tourisme.

            Le Plan lumière relève bien d’un double aspect : la dimension éclairage public comme dépassant le strict aspect sécuritaire et un aspect patrimonial permettant de mettre en valeur les aspects architecturaux remarquables ou anecdotiques, et donc de véritablement faire “ parler ” les pierres. Et dans sa globalité la ville doit devenir selon les propos mêmes de M. Crombé “ plus lisible, plus conviviale, plus sûre, plus patrimoniale ”.

c. La qualité et les propriétés de l’éclairage

            L’éclairage doit permettre de remodeler le paysage urbain en fonction d’exigences nocturnes qui peuvent tout à fait être différentes de celles diurnes. Il ne s’agit pas de faire une restitution fidèle des paysages urbains, mais au contraire de disposer d’un moyen d’effectuer un renouvellement périodique de l’espace, et donc de contribuer à son enrichissement[6].

            Ainsi, l’éclairage, ramené trop souvent à un outil de sécurité, constitue de par ses qualités spatiales le support indispensable à la création d’ambiances nocturnes qui sans lui disparaîtraient. Ainsi, un nouveau paysage doit contribuer à la création d’un nouvel espace enrichissant la structure de la ville : l’éclairage doit donc améliorer l’approche de la cité en mettant en évidence la richesse de son tissu urbain. Par une succession de lieux différemment éclairés, par des éclairages diffus et ponctuels, par des couleurs différentes se matérialise la structure de la ville, en faisant ressortir les lieux monumentaux et les perspectives, les points hauts ou bas et allant jusqu’à pouvoir dessiner les caractères différents de certains quartiers.

            Au niveau d’un aménagement ponctuel, l’éclairage, s’il doit assurer un niveau de visibilité suffisant au développement des activités, contribue aussi à la définition de cet espace et à la création d’ambiances nocturnes particulières. En jouant sur la couleur et l’intensité des sources lumineuses, sur la hauteur et la disposition des supports, en déterminant les surfaces éclairées, on peut souligner ou remettre en cause les qualités diurnes d’un espace. Ainsi certains lieux  ou monuments qui semblent sans intérêt le jour revêtent une dimension plus importante la nuit. C’est ce qui constitue véritablement la magie de la lumière.

            L’éclairage public relaie la lumière du jour afin de maintenir un niveau de sécurité suffisant: ainsi entre en jeu l’importance du niveau de luminance, de son uniformité (par le problème des zones d’ombre par exemple), la limitation de l’éblouissement ou le guidage visuel tant des automobilistes que des piétons.

            En matière de mobilier urbain, le matériel d’éclairage est constitué de luminaires ainsi que d’un support, devant assurer la résistance mécanique de l’ensemble. Outre le fait de remplir ses fonctions, il faut une intégration dans l’espace ou l’environnement, à savoir que le mobilier doit s’intégrer à d’autres mobiliers urbains, et doit donc éviter de surcharger le paysage urbain. De même, il faut éviter les accumulations de supports ou l’encombrement dans les cheminements. Aussi, il peut permettre par exemple de supporter des éléments publicitaires intégrés dans le paysage urbain. Mais également l’on doit bien entendu prendre en considération les spécificités propres de la ville de Bordeaux en utilisant des candélabres traditionnels et historiques que l’on cherche à réhabiliter (comme les lanternes de cuivre situées dans l’axe médian de nombreuses rues des quartiers historiques de Bordeaux).

            Mais aussi il existe une position normale ainsi qu’une position de veille dans l’éclairage de veille que pour l’illumination des bâtiments : on peut ainsi moduler ou interrompre l’éclairage, notamment par des soucis d’économie d’énergie. Ceci s’applique dans la plupart des projets de mise en lumière.

            Un effort de maintenance est également à réaliser afin de prévenir les éventuelles difficultés : il s’agit avant tout d’un travail du quotidien passant par du “ relamping ” et de l’entretien, mais les nouvelles techniques doivent permettre de rendre la maintenance plus affinée et limitée, c’est-à-dire par l’intermédiaire d’un contrôle par ordinateur en plus des signalements.

 

            L’intérêt pour effectuer des mises en lumière et pour renouveler l’éclairage public est important au vu de l’intérêt porté par la municipalité, mais il s’agit de comprendre quelle est l’ampleur des moyens permettant de remplir les objectifs.

 

 

Section II : LES MOYENS MIS EN PLACE POUR LES REALISATIONS

 

            Ceci peut être révélé tant par les outils préalables à la mise en place du Plan lumière que par la réalisation concrète.

 

A / Les outils pour la mise en place du Plan lumière.

 

            Le maire de Bordeaux Alain Juppé a souhaité l’établissement d’un schéma directeur d’aménagement lumière avec une consultation auprès de concepteurs lumière, consultation  remportée par Roger Narboni et son agence Concepto, afin de faire une étude. Il a été établi en 1996 et présenté au comité de pilotage présidé par le premier adjoint, sous la direction de Me Jean-dit-Cazaux, conseiller municipal délégué. M. Crombé, directeur général de la DGAU urbanisme, architecture, déplacements, mises en lumière et éclairage public, en assure le suivi et la gestion.

            L’idée est que chaque idée maîtresse engendre des propositions lumière ou des orientations, de manière à composer un paysage et une morphologie nocturnes, et redonner ainsi à Bordeaux un impact fort et affirmé la nuit. Ceci se traduit par des plans présentés fournis avec les travaux et permettant d’établir des spécifications ainsi qu’un cahier des charges, de manière à élaborer une véritable politique d’urbanisme lumière pour un éclairage urbain de qualité.

            Concrètement, l’agence, après des contacts et des échanges de vue sur la ville de Bordeaux, et sa stratégie de développement urbain, sur les projets urbains architecturaux en cours d’étude, a opéré la mise en place de la faisabilité qui s’est déroulée en trois étapes sur une période d’environ six mois.

 

1. Le schéma directeur d’aménagement lumière (SDAL).

Il est établi avec au préalable une analyse des aménagements diurne et nocturne existants, mais aussi de la ville.

On cherche alors à prendre connaissance de la ville dans tout ce qui fait son identité, mais aussi des axes perceptifs tout comme des points remarquables, des projets urbains (infrastructures, transports,...), des fonctions, des compositions urbaines, de l’environnement nocturne et lumineux qui existent. Ainsi établit-on un diagnostic qualitatif et une analyse de l’impact des propositions d’éclairage pour l’image nocturne du site. Il obéit bien sûr aux conditions en matière de règles locales d’urbanisme quant à sa mise en place (sous l’étiquette de planification urbaine, les règles locales d’urbanisme comprennent les schémas directeurs et les plans d’occupation des sols).

            Ainsi peut-on préparer et coordonner le cadre de futurs projets selon quatre lignes directrices :

-          les principes synoptiques et les six idées maîtresses (projeter la nuit la structure historique et l’évolution de la ville; guider les visiteurs en signalant accès, entrées et portes de la ville; densifier l’image nocturne dans la ceinture des cours; affirmer la présence de la Garonne et l’importance des deux rives bordelaises; souligner le patrimoine et les détails architecturaux remarquables, créer un système de “ nodules lumière ” dans les quartiers),

-          la composition nocturne des sites,

-          l’éclairage des espaces publics,

-          l’éclairage des architectures.

            Le SDAL permet ainsi de faire une vision du général au particulier et établit une réflexion sur la ville dans l’espace public. C’est donc le document de référence pour définir la politique de mise en lumière de la ville, les règles communes qui devront être prises en compte par les concepteurs. Ces règles minimales doivent permettre de rendre harmonieux le paysage nocturne bordelais, ce qui n’empêche pas pour autant l’imagination des concepteurs pour l’enrichir, certes dans le respect de certaines règles minimales, “ car Bordeaux doit avoir, à l’échelle des promeneurs, des images nocturnes multiples, vivantes et diversifiées ”. L’outil qu’est le SDAL peut s’enrichir par la suite des différents apports des différents concepteurs, par concours sur certains sites.

            Le SDAL peut donc apporter une autre culture de l’aménagement, en complétant la panoplie des outils mis aujourd’hui à la disposition des élus, comme le schéma directeur d’aménagement urbain, le projet de ville, le plan d’occupation des sols, le plan de déplacement, le schéma des transports urbains, le schéma piétonnier,... Voici sa présentation en deux parties.

a. La première partie du SDAL : l’analyse de l’existant[7]

            Mettre en œuvre une “ stratégie nocturne globale pour développer progressivement à Bordeaux un éclairage urbain de qualité et une image nocturne novatrice et attractive à la hauteur des ambitions affichées ” : voilà le souhait exprimé par la municipalité pour mettre en place le Schéma directeur d’aménagement lumière, préalable au Plan lumière dans le cadre du Projet urbain.

            L’analyse de l’existant repose sur les éléments suivants : la structure urbaine, les deux rives, l’évolution urbaine, les illuminations, le mobilier de style, les ambiances nocturnes, les tonalités de lumière. Elle nous renseigne sur la découverte lointaine ainsi que sur l’accès à la ville. Ainsi, si le jour on voit bien la position de Bordeaux et l’environnement paysager, la nuit la lecture est complexe, la vue de la ville la nuit est disparate, quelle que soit l’entrée choisie : les points lumineux et les candélabres permettent seuls de matérialiser véritablement la ville de Bordeaux dans l’agglomération.

            Aussi doit-on bien identifier l’architecture de la ville issue des différents développements historiques : le Bordeaux médiéval, le Bordeaux du XVIIIème siècle et le Bordeaux des grands ensembles du XXème siècle.

            Egalement a été fait l’inventaire des édifices publics ainsi que des architectures remarquables A ce titre, il est intéressant de noter que Bordeaux a le secteur sauvegardé le plus grand de France (il correspond à la partie historique de la ville où les conditions en matière d’urbanisme sont les plus strictes). Ainsi la ville qui a résisté à l’épreuve du temps tout comme à celle des grands conflits, ce qui est loin d’être de cas de nombreuses villes françaises, est riche en monuments, bâtiments et façades remarquables ainsi qu'en parcs et jardins, et répertoriables en fonction des diverses époques du développement de la ville. Il existe donc une richesse composée en fonction de la qualité ainsi que des différentes époques.

            Pour ce qui est des quartiers, de très fortes identités se dégagent, issues de leurs différentes spécificités, diversités et richesses. Car la vision de la ville peut se faire également au travers des différents quartiers que sont par exemple Caudéran, Bacalan, la Bastide, Belcier, Saint-Pierre ou Saint-Michel.

            L’environnement lumineux existant est également analysé. Il nous est montré que la ville de Bordeaux est relativement sombre, c’est-à-dire que les reliefs dans les éclairages lumineux sont très effacés. Quelques grands édifices se détachent de cet ensemble, alors que la Garonne reste comme une zone de rejet, constituant ainsi une masse noire. A propos de l’éclairage urbain, il existe une certaine diversité, surtout en fonction des excroissances dans la composition de la ville (comme la zone du lac) ; les boulevards ont par ailleurs un mobilier de type autoroutier, peu esthétique et assurant la fonction minimale sécuritaire. Vers la zone de la place des Quinconces un renouvellement partiel a été opéré, ce qui crée une certaine cacophonie tant pour les lampes que pour les mobiliers.

            Pour ce qui est des illuminations et événements lumineux un inventaire de l’illumination des monuments bordelais montre que certains sont très illuminés, même trop, d’autres sont sombres, d’autres encore n’ont qu’un éclairage disparate. Ainsi voit-on apparaître un phénomène de “ mitage ”, beaucoup d’éléments semblant relever du hasard des assemblages ou des rénovations (c’est-à-dire en faisant des interventions particulières non pensées dans la cohérence globale), et qui est en voie de régulation.

            Le patrimoine du mobilier d’éclairage bordelais a été qualifié de très intéressant, de riche. Peu de zones en effet sont d’un style contemporain pouvant ne pas être dans le même ton avec l’image et le caractère de la ville. Beaucoup de lanternes caractéristiques sont à circonscrire et à conserver, car elles relèvent du patrimoine architectural bordelais. Mais parfois l’harmonie n’est pas de mise. Ainsi devra-t-on à l’avenir avoir un souci de préservation.

b. La seconde partie du SDAL[8]

            L’ambition pour la vie nocturne bordelaise est essentiellement de projeter la nuit la structure et l’évolution de la ville, de guider les visiteurs, de densifier l’image nocturne dans la ceinture des cours, de réaffirmer la Garonne et la rive gauche, de souligner le patrimoine (par des parcours de nuit, etc.), de mettre en place un système de “ nodules lumière ”dans les quartiers, ce qui correspond aux six idées maîtresses. L’on cherche à mettre en place une véritable politique d’urbanisme lumière pour assurer un éclairage urbain de qualité tout comme des mises en lumière de bâtiments. Ce n’est qu’après que sont définies des spécifications ainsi qu’un cahier des charges.

            Tout d'abord, pour ce qui est de la morphologie nocturne, l’ambition est de donner à percevoir la structure et l’évolution urbaine, ainsi qu’une plus grande compréhension de son évolution historique, par le choix de certaines tonalités d’éclairage, le site de Bordeaux étant structuré par la boucle de la Garonne. Ainsi en est-il de l’éclairage spécifique des quais, des principaux tracés fondateurs de la ville, de la ceinture des Cours, et de celle des boulevards, représentatives de différentes époques, ou du Pont de pierre. Les espaces publics doivent donc avoir une atmosphère chaleureuse et conviviale, et restituer les différents tons de pierre bordelais. Il est précisé que les axes principaux doivent être éclairés de façon plus importante pour dessiner la morphologie nocturne bordelaise, avec la contribution du mobilier urbain. L’on veut ainsi conduire de façon virtuelle vers la ville centre par les pénétrantes. Il est avéré que les entrées de ville sont importantes quant à l’attrait pour la ville. Il s’agit donc de repérer certains axes et lieux de perception de la ville où la lumière peut jouer un rôle de séduction, de rythme ou de mise en scène, comme l’échangeur nord d’accès à Bordeaux, situé sur la rocade, les traversées de la Garonne, mais aussi avec un traitement particulier des barrières et des “ agrafes ” ou des places. La découverte de la ville doit donc être progressive et ainsi afficher sa nouvelle image de marque, à la fois par les points incontournables mais aussi par la hiérarchie des axes visant à conserver une certaine harmonisation Ainsi, le grand principe est que pour chaque type de sujet d’éclairage correspond un éclairage précis. On veut surtout “ différencier dans un premier temps certaines voies structurantes et parallèlement hiérarchiser les autre voies en fonction de leur usage et de leur qualité urbaine ”. Egalement l’on porte attention à l’éclairage dans les quartiers afin de permettre un certain rééquilibrage.

            Pour ce qui est de l’éclairage urbain, les préoccupations se portent sur les tonalités de lumière, sur les typologies d’éclairage (à savoir permettre d’attribuer un type d’éclairage précis correspondant à un type de voie particulier), sur les vélums lumineux ou encore sur les intensités lumineuses. La préoccupation se fait donc essentiellement au niveau de la voirie.

            Pour ce qui est de la composition nocturne, une attention particulière est portée sur les axes et lieux-clé qui constituent non seulement des repères mais aussi et surtout des lieux de vie et de rencontre, symboles des quartiers (boulevards, cours, quais, axes historiques, places du centre ville ou des quartiers et “ agrafes ”). Mais aussi il est porté attention sur l’éclairage paysager (pour souligner une “ banane verte ” et rehausser certains grands vides nocturnes), l’éclairage aquatique (pour visualiser un “ serpent bleu ”entre la Garonne, les bassins à flots et le Lac), les points focaux et les perspectives à privilégier, ainsi que sur le patrimoine architectural (au travers des édifices et éléments visibles dans la silhouette nocturne de la rive gauche, des évènements lumineux, des édifices liés aux nodules lumière dans les quartiers. On met ainsi l’accent sur la typologie d’éclairage, la tonalité de lumière ou le mobilier. Le fait de valoriser l’éclairage nocturne va pouvoir permettre de créer un appel visuel.

            A propos de la silhouette nocturne, celle-ci se découvre surtout depuis la Garonne, avec les points hauts. Il est proposé de réinventer deux nouveaux ordres superposés pour les façades des quais, avec l’image nocturne des cours et différentes rues transversales. Et la mise en évidence des parties visibles du patrimoine historique pourra être révélée au niveau du regard du piéton, et aussi des rehauts lumineux pour souligner des détails architecturaux remarquables visibles par les promeneurs.

Le patrimoine architectural et les illuminations des édifices et des détails architecturaux sont aussi des éléments sur lesquels le Schéma directeur d’aménagement lumière porte son attention, en plus de la voirie. Le patrimoine de Bordeaux est riche et diversifié, des priorités sont donc à faire en fonction des rôles potentiels à jouer dans la morphologie et les perspectives nocturnes. Il s’agit toutefois d’éviter une sur-illumination de monuments ce qui pourrait entraîner des phénomènes de zones d’ombre, ainsi que d’éviter de vastes zones d’ombre ainsi que de veiller à éviter la pollution d’enseignes lumineuses publicitaires parasites. Ainsi, l’éclairage des détails architecturaux doit permettre de développer un regard sensible du citadin sur la mémoire architecturale bordelaise, afin d’encourager les découvertes et les promenades nocturnes. Les projets seront à définir dans leur déroulement progressif dans le Plan lumière. Pour dessiner la composition nocturne souhaitée par Bordeaux, ou mettre en valeur les détails architecturaux, voilà ce que permettent les mises en lumière dans le cadre du patrimoine suite à un nombre assez important de réalisations, au delà de l’éclairage de la voirie.

Enfin, une attention a été portée à l’éclairage dans les quartiers, avec l’intérêt de créer des nodules de lumière et des liaisons inter quartiers.

L’éclairage se fait donc aux endroits et selon les axes stratégiques correspondant aux lieux de vie et lieux de prestige ou d’importance (c’est-à-dire incontournables ou ayant des monuments prestigieux). Ainsi, a-t-on mis en place les bases pour mettre en place le Plan lumière en fonction du patrimoine, de l’historicité, de l’identité de Bordeaux, ce qui constitue sûrement une nouvelle préoccupation.

2. Le Plan lumière

Plus concret, il établit une liste de réalisations par voies, places, sites, espaces verts, ouvrages d’art, monuments, …mais aussi un calendrier basé sur une proposition de planification annuelle des investissements, une hiérarchisation des espaces et des priorités, ainsi que des axes visuels et perspectifs à privilégier. C’est de lui que l’on parle le plus lorsque l’on parle de Plan lumière mais en fait il n’est qu’une étape du processus de mise en place des nouvelles réalisations.

Le Plan lumière revêt un aspect plus patrimonial se référant à des édifices connus. C’est l’outil qui se distingue le plus (environ 20 mises en lumière ont été effectuées jusqu’à fin juin 1999), même si le calendrier ne peut être tenu correctement : ainsi l’on n’a pu suivre la programmation possible établie par manque de budget. L’on évolue donc en fonction de priorités établies par ailleurs.

Le Plan lumière est donc comme une accroche avec une identité particulière, et est un élément de plus pour signifier ou annoncer d’autres éléments, comme le parcours patrimonial. Mais il est aussi lié avec le mobilier urbain, que l’on cherche à harmoniser dans les couleurs (bleu réal) afin d’assurer une certaine esthétique dans la ville.

3. La charte lumière

            Elle se veut comme le complément technique du SDAL, car “ elle institue et résume, en fonction des typologies d’espace des principes d’éclairage qui découlent des orientations fondamentales exprimées dans le SDAL ”. Elle est complétée par des fiches typologiques préalables à la réalisation sur le terrain.

La charte lumière établit des prescriptions ainsi qu’un cahier des charges pour le mobilier lumière, la signalétique ou encore la temporalité des éclairages. Elle traite de la colorimétrie ainsi que de la cohérence dans le matériel lui-même.

            Ainsi, elle poursuit un but simplement indicatif, car chaque site doit être mise en place une étude précise est réalisée individuellement et postérieurement pour mettre en place un véritable projet d’éclairage. L’intérêt de la Charte lumière est d’aider les services et les concepteurs dans les projets d’éclairage ainsi que de permettre la réflexion sur le mobilier tout comme de porter des indications sur le traitement lumineux.

            Sa présentation se fait sur les thématiques suivantes : l’agglomération et la ville (où l’on porte des réflexions quant à l’entrée de la ville et aux pénétrantes que l’on cherche à valoriser), le centre-ville, le centre historique, les quais (avec l’aménagement de la rive gauche en fonction du projet urbain), les parcs et les espaces verts (l’ambition est de “ rehausser les grands vides nocturnes ”), l’eau (on veut permettre la découverte du fleuve la nuit ainsi que dessiner une trame aquatique), le patrimoine architectural (avec une mise en valeur au niveau du regard du piéton ainsi qu’une réflexion sur les édifices civils).

            “ L’éclairage des détails architecturaux ne doit pas devenir lui-même un postiche de style; il doit a contrario permettre de développer un regard sensible du citadin sur la mémoire architecturale bordelaise, pour encourager découvertes et promenades nocturnes ” : les monuments à éclairer pour une mise en valeur nocturne des quartiers obéissent donc à cette logique.

 

            Ce n’est qu’une fois que ces documents sont conçus qu’il est possible de concrétiser la mise en place du Plan lumière. En effet, le Plan lumière et la Charte lumière régulent des spécifications de manière à mettre en place, au fil des années, en fonction des actions qui seront menées, et des investissements décidés, une véritable politique d’urbanisme lumière, après des appels à candidature et concours. C’est ainsi que des règles communes sont définies, et seront prises en compte par les différents concepteurs appelés à concevoir des illuminations, pour orchestrer et rendre harmonieux l’ensemble du paysage nocturne bordelais.

 

B/ La concrétisation de la mise en place du Plan lumière.

 

            Pour ce qui est de la concrétisation, il semble de plus en plus nécessaire de prendre en compte non seulement ce qui relève de l’éclairage, mais aussi des autres éléments : on ne saurait concevoir une vision particulariste comme elle a pu être par le passé, pour avoir une vision globale de l’aspect de la ville de demain. Il faut donc une organisation ainsi qu’une conciliation en associant les différents services techniques.

            Ainsi, et nous l’avons vu plus haut, le Plan lumière, même si sa mise en place concerne de nombreux acteurs, relève spécifiquement du service des mises en lumière, ce qui crée une plus grande facilité de travail.

1. Une réalisation dans un champ large de cohérence.

            Les dossiers sont répartis par agent. Au départ, la répartition se fait en fonction des tâches mais très vite a été rendue nécessaire la nécessité de polyvalence. L’éclairage relevant de la voirie, sa réalisation s’identifie donc à un projet de voirie, réalisé par la mairie. Lors d’un projet de voirie, un avis est fait à l’éclairage public, car l’éclairage d’une voie ou d’un édifice, comme la Porte de la Monnaie par exemple, ne se fait que suite à la réfection de la voie. En effet, “ une suite de restaurations ne prend sa valeur que si les espaces qui les relient sont eux même restaurés ”[9] : c’est ce qui permet de donner un certain “ cachet ” à la réalisation. Lorsqu’un projet est mis en place, l’avis concerne non seulement le service de l’éclairage public, mais aussi le service des espaces verts, celui des espaces publics mors des réaménagements de places, ainsi que celui de la réglementation. Le choix du mobilier urbain se fait par une décision des services de la voirie (cette décision tenant plus ou moins compte des désirs ou des demandes des habitants). Or la Communauté urbaine de Bordeaux est propriétaire de la voirie (y compris les places), la mairie intervenant en aval : les décisions se font ainsi conjointement entre la CUB, la mairie et les riverains. Toutefois, ceci montre une déconnexion à la frange des communes de la communauté urbaine, hormis pour le tramway, dont le projet implique l’ensemble des communes de la CUB pour ce qui est notamment de l’illumination du parcours.

            Ainsi voit-on la nécessité de penser la totalité, entre le mobilier destiné à l’éclairage, les panneaux de signalisation, les Abribus, les arbres, les places de stationnement. Aussi faut-il tenir compte de soucis pratiques, comme par exemple les facilités destinées aux handicapés. Ces critères sont de plus en plus importants, notamment pour ce qui est par exemple de la sensibilité à l’esthétique lors de la disposition des éléments : il existe à ce titre une commission du mobilier urbain, informelle, et donnant un avis technique, mais en fait le choix se fait en fonction d’une charte, afin d’éviter les trop importantes disparités. Madame Bibes-Froment joue un rôle important et nécessaire en la matière, s’inspirant d’éléments historiques, de catalogues, de modèles importés,... Car si l’éclairage a évidemment des implications pour la nuit, il est nécessaire de voir que les lieux vivent le jour également, avec toutes les incidences que peut causer la disposition du mobilier urbain.

            Il doit ainsi exister une concertation avec les autres services pour penser le projet de façon plus large. Mais aussi il s’agit pour ce qui est du patrimoine de contribuer à la meilleure réhabilitation possible : certes, le ravalement est possible, mais également il s’agit de restructurer les espaces environnants, en supprimant un parking par exemple, ce qui fut le cas pour la Place de la Bourse, ou en effectuant un nettoyage systématique des tags.

2. Les critères pris en compte pour la réalisation du Plan lumière.

            Tout d’abord, les grandes directives prises par le maire, avec la collaboration de l’adjoint à l’urbanisme, à l’architecture et aux bâtiments architecturaux, M. Lavroff, et du conseiller municipal aux bibliothèques municipales, au patrimoine historique, au Plan lumière et au mobilier urbain, M. Jean-dit-Cazaux. Ce dernier m’a d’ailleurs précisé que le travail ne se fait pas dans l’urgence, mais dans la pérennité, en prenant des précautions, dans la concertation avec le pôle technique municipal, et en prenant le temps d’écouter la population, le maire étant largement favorable pour l’écoute d’associations.

Ainsi a-t-on pu établir le calendrier[10], en fonction de tous ces éléments et de toutes ces rencontres.

            Les illuminations tant des monuments que des voies obéissent à un calendrier précis quant à leur réalisation, et correspondant au Plan lumière, si toutefois l’on peut suivre fidèlement ce calendrier. Mais aussi des exigences sont communes avec les domaines des espaces publics et des espaces verts, de même pour la voirie (gérée par la CUB). Ceci semble un peu complexe à mettre en place, donc un peu long à réaliser. Ainsi, la constatation du déroulement du Plan lumière dans l’aspect voirie s’établit sur un temps assez long.

            Pour ce qui est des mises en lumière, on effectue une priorité pour les sites classés avec une possibilité de ravalement ou de réparation pour les sites les plus notables : la constatation de l’évolution de la mise en place du Plan lumière concernant l’aspect des mises en lumière est donc plus rapide que pour l’aspect voirie. Pour l’établissement d’une mise en lumière, en prenant les exemples de la basilique Saint-Seurin ou de la Place des Martyrs de la Résistance, le programme définit au préalable une description historique ainsi qu’une description de la nature et de l’emplacement du site, dans le but de prendre en compte l’histoire particulière du monument, son origine, mais aussi son environnement, avant de se justifier quant à l’objectif de la consultation. Pour ce qui est de l’exemple présenté, il s’agit d’une illumination directe du monument afin d’en avoir une lecture d’ensemble et des détails architecturaux : l’on envisage donc de donner un éclat et une image nocturne en rapport avec le prestige du site et l’environnement[11]. Pour ce qui est du Jardin public, autre exemple rencontré, il doit prendre toute sa place dans le futur paysage nocturne : ainsi, seules les frondaisons ont été mises en concours.

            Pour les monuments emblématiques du patrimoine bordelais, on procède donc également à une opération de ravalement souhaitable, en plus de la mise en lumière. L’éclairage public environnemental est modulable en fonction de l’optimisation que l’on veut donner au projet. Pour ce qui est des opérations effectuées dans le cadre du secteur sauvegardé, on effectue les opération sous le contrôle obligatoire de l’Architecte des Bâtiments de France et de la DRAC (direction régionale aux affaires culturelles), dans le but de respecter le plus possible les bâtiments et édifices remarquables : ainsi un soin tout particulier est apporté à l’encastrement des sources de lumière ainsi qu’au fait d’éviter les éblouissements qui ont peu la faveur des habitants.

            La question des bâtiments privés est assez difficile, car il n’est pas possible de financer des installation privées pourtant intéressantes à valoriser. A défaut il est possible de mettre en place un système d’incitations comme à Lyon, les particuliers effectuant les investissements concernant les installations, et la ville s’engageant à payer les consommations. Ainsi existe-t-il un problème pour l’un des bâtiments les plus imposants de Bordeaux, comme la gare SNCF, car la ville serait intéressée par son éclairage mais elle ne doit pas financer le projet. Des difficultés existent mais les personnes sont toujours plus ou moins intéressées par la mise en valeur du patrimoine. Il convient également de négocier avec les personnes qui veulent effectuer une mise en valeur sans apporter leur contribution, ou bien qui veulent mettre en place un éclairage assez particulier dans l’intensité ou dans la couleur, notamment dans une perspective publicitaire: il peut s’intégrer dans le paysage nocturne mais dans certains lieux précis et sous certaines conditions.

3. Le déroulement d’une mise en lumière

            Il existe deux aspects du travail du service [12]:

-          ce qui relève des projets, passant par les études, les appels d’offre (pour les concepteurs et pour la consultation d’entreprises),

-          ce qui relève de l’éclairage, incluant le suivi des chantiers.

            Il existe également deux façons de hiérarchiser les sites selon leur importance, tant pour les places que pour les bâtiments : ainsi met-on en œuvre un traitement direct, ou une maîtrise d’œuvre pour les réalisations les plus intéressantes.

Après avoir décidé des projets que l’on veut réaliser, l’on met en recherche des concepteurs[13] que l’on choisit après appel à candidatures pour leurs compétences. Cinq candidats sont choisis sur l’ensemble des dossiers.

Ensuite en comité technique l’on analyse selon les critères de la consultation. On propose au comité de pilotage, politique, et qui choisit. L’élu, Me Jean-dit-Cazaux décide en dernier lieu du concepteur choisi car il est l’élu qui représente le maire, puis il soumet sa décision au maire pour accord,  notamment avec appui de courrier du directeur de la DGAU.

Cela prend vingt semaines en aller et retour d’analyse de dossier pour savoir celui qui a été finalement retenu, avec un avant-projet sommaire, puis un avant projet définitif, et enfin un appel d’offre à entreprises[14] (avec consultation afin de déterminer au mieux la compétence et le prix).

Puis enfin intervient la phase des travaux proprement dite, pour une durée avoisinant deux mois. Puis sont réalisés des essais et des réglages des couleurs ou des intensités, avec l’avis critique des différents décideurs, à commencer par le maire, ce qui permet de valider concrètement le choix. Enfin s’effectuent les mises en lumière définitives, pour les plus emblématiques avec une inauguration. Le temps total des réalisations varie entre six et huit mois en général, un peu plus pour les réalisations plus importantes (si l’on désire aussi procéder à un ravalement : ainsi le fait qu’un bâtiment soit plus important fait qu’il est mieux traité, ce qui peut nécessiter deux années, comme pour le Grand Théâtre.

 

Successivement, la mise en place petit à petit des mises en lumière permettra de constater l’envergure du déploiement du Plan lumière et ainsi de voir établi tout un ensemble de réalisations.

            Mais il semble que le déroulement des travaux tende à rencontrer certaines difficultés, l’éclairement des voies tardant un peu à cause du choix de l’objet mât par les élus et le maire dans les zones où les support n’ont pas d’intérêt patrimonial ou historique, et les mises en lumière rencontrant parfois quelques problèmes que l’on n’aurait pu envisager avant la phase active des réalisations[15].

 

            Il existe une nature différente entre la mise en lumière et la requalification lumineuse de voies. Il est ainsi avéré qu’il est plus aisé de travailler sur la voirie, car les mises en lumière étaient jugées secondaires auparavant, donc rares. Il est donc avant tout une question d’opportunité de travailler sur les mises en lumière car c’est par elles que l’on se rend compte le plus de la mise en place effective du Plan lumière, encore faut-il définir les priorités en matière de mises en lumière, que ce soit au niveau géographique ou au niveau de l’intérêt.

            Il existe une aussi une distinction importante qui est opérée entre le patrimoine historique et le patrimoine moderne quant au traitement, notamment pour ce qui est de la place accordée à l’originalité. Toutefois, chaque cas est particulier. Ainsi doit-on tenir compte des points communs architecturaux ou géographiques pour garder une certaine cohérence.

 

            Mais aussi il est possible de pouvoir bénéficier de subventions pour la réalisation des mises en lumière. Ces subventions arrivent à la ville, non au service de l’éclairage. C’est ainsi que la part du budget alloué au Plan lumière peut évoluer par décision du maire. Mais toutefois la même somme a été allouée dès l’origine, sans évolution.

Concrètement, pour ce qui est de l’aspect du financement, une aide est accordée par l’Europe dans le cadre des FEDER pour certaines réalisations, mais aussi un financement de l’Etat complète les subventions. Le financement se fait de façon à peu près équilibrée entre l’Europe, l’Etat et la ville lorsque les fonds européens sont attribués, sinon le financement se fait à 60% par la commune et à 40% par l’Etat (par le biais de la DATAR, du fait du protocole d’accord avec le ministère de la culture). Il existe aussi des opérations qui sont intégralement financées par la commune, donc sans participation de l’Etat.

            L’intervention de l’Etat se fait à hauteur de quatre millions de francs sur cinq ans, et l’Europe à hauteur de un million de francs sur quatre projets.

 

            Ainsi, il existe un certain nombre de problèmes pour ce qui est de la confrontation des réalisations aux objectifs. Le budget alloué, limité à quatre millions de francs annuels, ne permet pas de suivre fidèlement le calendrier du Plan lumière.. En effet, les décisions sont parfois longues à mettre en place, du fait de difficultés budgétaires. En effet, le budget accordé est de 4 millions de francs par an, ce qui est peu. Ainsi, la réalisation de la mise en lumière du Grand Théâtre a duré deux ans, pour un coût de 2,7 millions de francs. Certes, il s’agit de la réalisation la plus onéreuse, et elle occupe plus de la moitié des crédits alloués.

 

 

Mineur au début, l’intérêt pour la lumière a été croissant, une étude et des projets ont été mis en place. Il s’agit toutefois de comprendre si les apports que le Plan lumière peuvent apporter à la ville de Bordeaux sont symboliques ou véritables.


SECONDE PARTIE

LES APPORTS ET LES ENJEUX DU PLAN LUMIERE POUR BORDEAUX : UNE POLITIQUE SYMBOLIQUE OU REELLEMENT INNOVANTE ET FONCTIONNELLE ?

 

 

            Le Plan lumière va progressivement prendre forme, en fonction des priorités établies. C’est ainsi que sa réalisation relativement rapide dans un élément valorisé qui est le patrimoine pourra assimiler mises en lumière comme ayant un aspect promotionnel  et redécouverte de la ville à une politique symbolique. Mais toutefois, il s’avère que le Plan lumière constitue malgré tout une véritable politique annexe, donc s’inscrivant dans le cadre d’autres réalisations.

 

Section I :  Le Plan lumière comme ELEMENT symbolique.

 

            Décidé “ à faire ses preuves ”, le maire a relancé un certain nombre de dossiers comme l’aménagement des deux rives ou le tramway, remplaçant le projet de métro abandonné. Mais aussi il a lancé le Plan lumière pour les monuments, le ravalement des façades, l’embellissement des places, la requalification de la voirie, ou encore pour l’amélioration de la propreté, prenant conscience de la valeur touristique de la ville mais aussi du formidable outil de communication que le Plan lumière peut lui procurer. “ Bordeaux était appelée la ‘belle endormie’. Belle, elle l’est de plus en plus. Endormie, elle ne l’est plus du tout ”, se félicite Alain Juppé[16]. Et sachant qu’il a été élu pour “ rattraper le temps perdu ”, le maire ne se prive pas de montrer aux Bordelais eux-mêmes une nouvelle représentation de leur ville.

Que ce soit pour l’ambiance, pour l’image que d’ailleurs l’on sur-valorise, pour dessiner la ville de demain, le Plan lumière montre une certaine efficacité quant à une véritable remise en marche de la ville, en attendant les véritables réalisations en terme d’infrastructures : ceci est la considération du défi du point de vue des décideurs en terme de notoriété et d’image. Bordeaux veut donc aspirer avant tout à une image de ville où il fait bon vivre (et elle est en cela très bien classée parmi l’ensemble des villes françaises du fait de sa progression), avant d’être une ville pratique ; la reconquête passe donc avant tout par le patrimoine : ceci est le point de vue des personnes pour qui sont destinées les nouvelles réalisations, à savoir la population. Toutes ces considérations relèvent du point de vue symbolique, “ pour qu’enfin on rende la rue et le fleuve aux Bordelais ” comme l’a écrit un journaliste local 15.

 

A/ La révélation du nouveau maire par une action sur l’image.

 

            La révélation de la gestion de la politique de la ville semble pouvoir être vue de façon symbolique par le fait qu’elle semble montrer que sa mise en place se fait de façon intéressée, mais peut aussi être un moyen pour faire constater la mise en œuvre concrète du Projet urbain à défaut de pouvoir mettre en place les chantiers les plus importants. Le principal caractère mis en place dans cette politique est de recycler les bâtiments anciens, de réutiliser les espaces centraux délaissés, et non plus de consommer les espaces libres, comme F. Cuillier, directeur de l’agence d’urbanisme, l’a évoqué.[17]

            Ainsi, l’objet, comme le dit le maire lui-même dans la présentation du Projet urbain, est de faire en sorte que l’effort entrepris soit “ à la fois symbolique et représentatif de ce que nous allons faire pour la ville ”.

1. La mise en place intéressée du Plan lumière

            L’hebdomadaire L’Express daté du 5 mai 1999, dans son article “ Bordeaux, objectif 2001, Juppé en quête de pouvoir ”, date correspondant à la prochaine échéance municipale, a publié: “ Qu’a fait le maire pour impressionner les Bordelais, toujours très sensibles à ce qu’ils peuvent voir? L’illumination des façades de la vieille ville ? Très beau, très réussi. Comment n’y avait-t-on pas pensé plus tôt ? ”. Le journaliste a par ailleurs rajouté, à propos des Bordelais: “ Chaban, lui, les faisait rêver ”. Alain Juppé a donc voulu séduire les Bordelais : le Plan lumière semble-t-il est un moyen direct pour redécouvrir la ville, mais aussi pour apprécier leur nouveau maire durant ce premier mandat.

            En effet, l’endettement de la ville et la redécouverte du patrimoine ont été des données pour le nouveau maire ayant la lourde tâche de succéder à Jacques Chaban-Delmas. N’étant pas originaire de la ville ou de la région bordelaise, n’ayant pas eu de fonctions dans l’entourage de l’ancien maire, Alain Juppé avait besoin d’un symbole fort par rapport à ses ambitions en témoignant de sa reconnaissance et en effectuant son action. Ainsi a-t-il mis en place le projet urbain, avec pour principales préoccupations la mise en place du tramway et le franchissement de la Garonne[18].

            Or, ces investissements que nous avons identifiés sont très lourds à mettre ne place, nécessitent beaucoup de temps, tardent à se concrétiser et ne créent pas forcément un consensus dans la population. Il est intéressant pour la municipalité de pouvoir mettre en œuvre une politique d’urbanisme permettant des équipements plus rapides à réaliser, moins contraignants, moins chers, et qui peuvent avoir un effet non négligeable auprès de la population.

            Pour le maire, le Plan lumière n’est que l’un des éléments dans lesquels Bordeaux s’investit. La question au début était celle du franchissement de la Garonne et la revalorisation des quais comme objectif prioritaire, mais les deux ambitions ont été rendues connexes, par les illuminations de certains lieux autour du fleuve. La réalisation du Plan lumière étant plus rapide à mettre en place, c’est tout naturellement sur celui-ci que se portent les efforts. Avant, il n’y avait pas de mises en lumière du fait qu’il n’y avait pas de volonté politique, ainsi qu’une question financière, la priorité étant donnée aux grands investissements. Mais l’affirmation du fait de vouloir s’investir dans le Plan lumière traduit le symbole de la mise en place du Projet urbain. La lumière, dont les conséquences culturelles sont à la mode, est une assise saine et solide, d’autres villes l’ont montré. La lumière est stable pour le reste, car elle permet de satisfaire un peu toutes les demandes, car elle est le symbole de la grandeur de l’image que l’on veut bien montrer. Mais aussi, la population est informée et écoutée, par le bulletin municipal et par les réunions de quartier : elle doit donc comprendre la cohérence du projet, non la monotonie. Son approche des réalisations se fait avant tout au niveau de l’esthétique: la rue est vue de tous, elle fait partie de l’attrait de la ville. Et la possibilité pour les citoyens de pouvoir s’exprimer confère incontestablement un certain aspect électoraliste du Plan lumière : l’on répond aux attentes. Le patrimoine est donc en quelque sorte un outil électoral, il accompagne les autres actions, il permet de révéler des choses. La rapidité dans la restauration joue donc sur l’efficacité, les atouts et le changement. Au départ, il est assez long de lancer des projets, mais la réalisation progressive montre qu’il n’y a pas de hasard. Et l’image différente de la ville permet de créer un certain sentiment de fierté pour la population.

            Bordeaux n’est certes pas inventive ou innovante en la matière, car elle tend à suivre la tendance, mais par contre on peut imaginer qu’il s’agit pour elle d’une véritable révolution culturelle. Cette politique est symbolique car elle apporte quelque chose de nouveau à la ville, tout en utilisant l’existant que l’on cherche à remettre en valeur : tout est une question d’image, une révélation. Peut-être que cela va faire connaître Bordeaux pour autre chose que le vin. Et toute la symbolique est bien dans ce qui est de la lumière[19]. Bordeaux n’a pas besoin de recherche d’identité, mais bien de valoriser la ville, et par là même ce à quoi tiennent les habitants.

 

            Les réalisations sont donc synonyme de dynamisme, de grande culture, permettent de valoriser ses propres atouts, ses équipements, le patrimoine architectural mais aussi de porter un message de dynamisme annonçant les réalisations futures, avec le relais espéré favorable des media locaux (Sud-Ouest ou France 3 Aquitaine). Ce n’est que l’un des éléments dans lequel Bordeaux s’investit, mais peut-être l’un de ceux qui se voit le mieux.

 

            Ainsi, un article du Monde publié le 13 juin 1998 “ Bordeaux, les premiers signes de réveil de la ‘belle endormie’ ”, indique qu’“ après le règne anesthésiant de Jacques Chaban-Delmas, Alain Juppé a engagé, avec succès, la rénovation de la capitale d’Aquitaine ” même si les relations entre l’ancien Premier ministre et les Bordelais ont été distantes. Le président de la chambre de commerce et d’industrie indique que financièrement le nouveau maire “ s’est privé de marge de manœuvre pour marquer une rupture ou un changement ” même s’il constate que ceci peut être une erreur. Le maire reconnaît que “ le temps de l’urbanisme est un temps très long ”, alors que son adjoint aux relations avec les collectivités territoriales se félicite d’une “ politique de proximité ” pour réveiller la “ belle endormie ”. C’est ainsi qu’avant le début des grandes réalisations, des réalisations comme le plan lumière sont indéniablement contributives à la réalisation de ces objectifs envisagés. Car par ailleurs, l’article informe d’une véritable politique au niveau de la sécurité et de la propreté, nous précisant que toutefois “ l’indice de satisfaction le plus fort, y compris parmi l’opposition, concerne assurément la réhabilitation du patrimoine architectural via une opération de ravalement systématique des façades, doublée d’un plan lumière ” : ainsi Bordeaux “ retrouve la fierté de ses sublimes alignements (...), de ses places redevenues magiques où les terrasses débordent allègrement. On dirait, enfin, le Sud ”. Ceci consacre donc véritablement la politique du maire dans ce domaine, d’autant plus que Gilles Savary, président du groupe socialiste au conseil municipal, met à l’actif du maire le plan lumière et la mise en valeur du patrimoine architectural.

2. Le choix judicieux des premières réalisations : l’image affichée d’un changement avant la réalisation concrète des mesures lourdes du Projet urbain.

            Le maire veut donc avant tout montrer la volonté de changement, par un projet prioritaire et un choix calculé d’opérations pour des paysages urbains nouveaux. Par exemple, l’urbanisation de la rive droite s’étalant sur de nombreuses années, la mise en lumière de la Bastide devra être alors d’autant plus saisissante que l’arrière-plan sera pendant longtemps sombre et peu lisible. Ainsi est-il proposé un rôle pédagogique de préfiguration de l’urbanisme du site, en simulant virtuellement un décor nocturne symbole d’une animation et d’un développement économique à venir, à défaut de pouvoir effectuer une réalisation concrète et rapide.

            Outre le réaménagement de nombreuses places qui sont une richesse du patrimoine architectural bordelais, il semble que le Plan lumière soit une véritable priorité pour le maire, toujours est-il qu’il y est véritablement attaché, mais en tout cas il peut permettre de souligner les traits de la ville de demain également fidèle à la richesse de son passé : ainsi peut-on outre apporter plus de sécurité, redécouvrir la ville, permettre de revitaliser et de valoriser des quartiers un peu oubliés, magnifier la nuit par des mises en valeur d’édifices ou de monuments remarquables.

            Avoir une ville plus belle et plus sûre, voilà qui peut être un signe fort de la politique de la ville, si toutefois ceci se fait à la hauteur du projet urbain.

            Mais avant même le déploiement du Plan lumière, avant même la révision de l’éclairage dans son ancienne version des bâtiments principaux de la ville, les premières réalisations à la genèse du Plan lumière sont la mise en lumière de la Place de la Bourse, l’un des lieux parmi les plus prestigieux de la ville, ainsi que de l’église Sainte-Marie du quartier de la Bastide sur la rive droite de la Garonne. Le choix de l’éclairage de ces bâtiments relève donc d’une mesure symbolique dans un premier temps pour ce qui est de la priorité donnée aux interventions.

            Tout d’abord, la Place de la Bourse, joyau touristique de Bordeaux, a indiqué probablement une magnificence à retrouver dans le cadre du passé et tout en préparant l’avenir, et permettant d’annoncer symboliquement le réveil de la ville de Bordeaux. La Place de la Bourse est en effet située sur les quais de la Garonne, dans la zone du secteur sauvegardé, donc la réalisation de l’opération a nécessité la contribution de l’architecte des Bâtiments de France, assez contraignante, ce qui témoigne de la motivation pour son illumination, complétée par un ravalement achevé en 1999. Mais le fait qu’elle appartienne à la Chambre de Commerce et d’Industrie a pu créer un certain avantage, et même un certain symbole.

            D’autre part, la mise en place de l’éclairage de l’église Sainte-Marie de la Bastide a pu être beaucoup plus facile en mettre en place du fait qu’elle n’appartient pas au secteur sauvegardé, est non-classée, et donc ne nécessite pas un appel de l’architecte des Bâtiments de France, surtout qu’elle n’est pas un bâtiment d’une architecture remarquable, mais la réalisation permet de donner aux Bastidiens un sentiment d’écoute de la part de la nouvelle municipalité. Egalement, à défaut de permettre d’opérer un rééquilibrage entre la rive gauche et la rive droite de la Garonne, cette mise en lumière permet d’être l’identification remarquable du quartier de la Bastide, séparé par la masse imposante du fleuve du reste de la ville. Ceci est donc peut-être comme une invitation à découvrir l’autre rive. Ainsi, l’installation du Méga-Rama dans l’enceinte de l’ancienne gare d’Orléans désaffectée, et surtout l’illumination du bâtiment peuvent permettre de revitaliser la zone, de même que l’installation future d’une antenne universitaire.

            Puis les réalisations des Chartrons, de l’église Saint-Michel et de la Bastide (avec l’église Sainte-Marie et la gare d’Orléans) qui se sont faites dans la continuité ne sont pas innocentes quant à leur choix car il s’agit de trois points hauts au dessus de la Garonne, la population étant informée régulièrement des réalisations, notamment par voie de presse ou par l’intermédiaire du bulletin municipal et ne saurait donc échapper à la publicité faite par le Plan lumière et autour de lui.

            Ont suivi en 1997 le Pont de Pierre, la flèche da la basilique Saint-Michel, la Porte de Bourgogne, le Jardin public ou encore la Cité Claveau.

            De plus, les bâtiments anciens désormais mis en lumière comme la Grosse Cloche début 1999, la colonne des Girondins en juillet 1999 et le Grand Théâtre en décembre 1999 concrétisent l’importance accordée aux mises en lumière, avec à chaque fois la célébration d’une inauguration publique par les élus, n’est pas non plus sans un effet publicitaire auprès de la population ou des acteurs. Mais toutefois l’originalité souvent réussie, comme le bleuté sur la Grosse Cloche, ne favorise pas l’unanimité malgré les essais qui se sont avérés être concluants. Mais pour ce qui est de la cathédrale, il est nécessaire de mettre en place avant tout l’opération de ravalement afin de donner toute sa magnificence à l’édifice.

            Progressivement, les mises en lumière permettront à l’avance de pouvoir dessiner ce que sera le projet urbain, axé selon le cours de la Garonne au travers des quartiers Bacalan, Bastide et Belcier, mais aussi selon un axe Est-Ouest développé dans le Projet urbain. Illuminer les bassins à flots et la base sous marine, achever la destruction de la Cité lumineuse permettent d’effectuer dans le paysage nocturne un fil conducteur des quartiers nord vers le centre, et non plus une rupture, synonyme d’abandon. L’on réalise symboliquement ce que l’on voudrait voir comme réalité.

 

            Ainsi, il est possible de se demander si la réalisation du Plan lumière est envisageable, au même titre que la campagne de ravalement par exemple, comme étant un effet d’annonce au projet urbain. Un article publié dans le journal La Tribune le 29 novembre 1995, soit six mois environ après la prises des fonctions de la nouvelle municipalité, et dont le titre est “ La ville d’Alain Juppé attend un effet mobilisateur ”, nous précise qu’ “ à côté [des] opérations lourdes qui tardent, l’illumination de la place de la Bourse, de l’église Sainte-Marie et de l’Hôtel de la Communauté urbaine de Bordeaux (CUB) pour la fin de l’année (...) ne sauraient combler les retards accumulés ”. Si leur utilité n’est pas de rattraper un retard, leur fonction hautement symbolique semble ici être mise clairement en évidence par un lieu emblématique et ancien, un édifice secondaire dans un quartier, la Bastide, qui demande à être réhabilité, ainsi qu’un bâtiment moderne du quartier Mériadeck. Mais l’évolution du Plan lumière a pu toutefois contribuer au fait qu’il s’agit d’un véritable programme intégré dans le cadre du Projet urbain, non un appendice fait de petites mesures secondaires destinées çà ou là à procurer une satisfaction partielle.

            Mais si le projet a les faveurs et la priorité du maire, peut-être est-ce bien car il permet aux habitants de patienter : éclairer les bassins à flot et la base sous marine comme un lien entre Bacalan et le centre-ville avant de réaliser concrètement le Projet urbain, traiter Saint-Michel et Caudéran pour reconsidérer ces quartiers avant la mise en place d’un programme à la perspective du quartier et de la ville, éclairer le Pont de Pierre outre la symbolique de l’édifice pour donner un signal aux Bastidiens d’être bien reliés au reste de la ville, en plus de l’église Sainte-Marie ou aussi en revalorisant les quais. La nuit serait donc comme un élément permettant de percevoir la ville de façon nouvelle, au travers de jeux d’ombre et d’éléments singuliers permettant de rendre plus perceptible à certains endroits les réalisations futures de façon symbolique. Il y aurait des territoires, des lieux, des points de vue attractifs: ainsi on esquisse les itinéraires les plus intéressants de la ville. Les premiers spectateurs sont les habitants et redécouvrir la ville fera d’eux des acteurs.

            Il existe ainsi de façon évidente un grand aspect politique, car l’investissement est loin d’être innocent : la lumière ne peut pas résoudre tout, mais quelque chose semble se détacher avec elle, même si ce quelque chose n’est pas toujours concrètement réalisé.

Certes la mise en valeur représente un certain coût mais l’on peut en imaginer l’impact du moment que l’évolution est contrôlée : en effet les premiers effets du Plan lumière semblent attester de certaines évolutions, notamment au niveau de la communication comme révélant la nouvelle ambiance ainsi mise en place.

 

B/ L’aspect symbolique de la réhabilitation du patrimoine redécouvert à la lumière des réalisations : une séduction pour les habitants.

 

            Le patrimoine fait partie d’une dimension symbolique car sa réhabilitation notamment par la lumière, et accompagnée d’autres mesures, permet de gagner la sympathie de la population pour ce qui est de la ville que l’on imagine redécouverte, par la volonté de mettre en place une politique de proximité car touchant la majorité des quartiers et des habitants de la ville au travers des réalisations ainsi choisies, permettant de faire patienter la population et de lui donner à voir les réalisations futures.

Cette véritable “ opération séduction ” vise également à permettre symboliquement à Bordeaux de repartir sur une nouvelle image, sur de nouvelles bases permettant de tenter de reconquérir un certain prestige, mais aussi de permettre d’utiliser un nouvel outil d’intervention culturelle à l’échelle de la ville, culture et patrimoine étant des notions extrêmement liées.

1. Vers la ré-appropriation de la ville par ses habitants grâce à la nouvelle image crée par le Plan lumière et promue par certaines animations de proximité.

            La lumière ne doit pas avoir des conséquences uniquement culturelles, mais aussi sociales, selon M. Dulout, car en effet elle peut permettre de revitaliser certaines zones sensibles, elle permet de créer une cohérence pour fédérer, resserrer les quartiers, outre l’aspect sécuritaire. Car la lumière peut être vue comme un symbole de la présence de la municipalité dans le quotidien, notamment dans le refus d’accepter un certain laisser-aller. N’y voit-on pas là une mesure symbolique de la lumière, qui à elle seule ne peut pas être capable de faire ceci ? Il s’agit donc d’un élément annonciateur de ce qui va être opéré par la suite. Et d’autre part, l’éclairage de nouvelles zones habitées, la volonté de prévenir les pannes électriques, la sécurité, l’impression d’une ville qui est mieux tenue participe déjà à cette fonction de donner à voir. L’on veut éviter des zones de « laisser-aller », ce qui n’est pas directement lié au Plan lumière mais qui relève des interventions d’entretien du quotidien, ce qui est une opération lourde mais nécessaire dans l’action en ce domaine.

            La notion politique est ainsi affirmée dès le départ : les élus veulent ainsi maîtriser les interventions pour que les électeurs aillent dans le même sens. L’élu a les moyens directs de faire avancer les choses, la communauté devant négocier. Ainsi, progressivement Bordeaux pourra reconquérir une certaine dimension qu’elle cherche toujours à démontrer. Bordeaux dispose maintenant d’une bonne image, ce qui contraste avec le retard passé pour ce qui est de la place de la lumière dans la ville. L’on montre ainsi que le maire a de l’ambition.

 

            Ainsi, le déploiement du Plan lumière permettra de pouvoir donner à voir, d’être une démonstration concrète d’un changement qui s’opère à la lumière des réalisations : Bordeaux peut ainsi rentrer dans son temps, mais aussi cela passe par des inaugurations ou des nouvelles réalisations comme indicateurs de la volonté politique. Les réalisations peuvent être utilisées comme un outil de communication, traduisant une nouvelle image tant auprès des media que de la population ou des visiteurs, et favorisant une certaine publicité car il s’agit d’un moyen supplémentaire de pouvoir faire parler de la ville sans qu’il y ait un coût très important : il existe donc un effet de publicité gratuite, la ville se voulant dynamique, les entreprises se référant à cette image pour pouvoir s’installer car cela montre qu’elles aussi sont dynamiques, encore faut-il en évaluer l’impact. Des cartes postales, des dépliants, des festivals, sont autant de moyens pour assurer la promotion de Bordeaux. Ainsi peut-on dévoiler ses atouts, limiter les critiques à propos du manque d’éclairage, parler de la ville en tout cas de façon positive et de supprimer l’impression d’inertie que pourrait créer le temps séparant la mise en place des grosses infrastructures ou le passé.

            Et ceci serait d’autant plus porteur d’une image dynamique que le lien serait fort avec des événements permettant de donner une identité remarquable, et permettant de réellement animer la ville autour des réalisations, et quitter cette embarrassante image de ville austère: les coupes du monde de football et de rugby, les festivités de l’an 2000 mais aussi la fête du fleuve, du vin, ou des inaugurations ponctuelles sont autant de points d’ancrage permettant de renouveler une certaine vie nocturne à Bordeaux et d’inciter par là même à découvrir les réalisations effectuées, en quelque sorte de pratiquer la ville aussi de nuit. L’on renouerait ainsi le lien entre les notions de lieu public et de rassemblement traditionnel. Par exemple, à l’occasion des journées du patrimoine, des programmes de “ nuits du patrimoine ” ont aussi été mis en place à Bordeaux, la ville rejoignant ainsi le groupe de villes ayant elles aussi mis en place des programmes de mise en lumière de monuments. Ainsi l’association Renaissance des cités d’Europe a choisi d’organiser de nuit une visite du quartier des Chartrons en cours de rénovation, notamment au niveau du ravalement des façades et du programme de réaménagement des quais, afin de redécouvrir les richesses qui ont fait l’histoire du quartier, mais aussi la découverte des résultats de la politique de ravalement des quais ainsi que de la mise en lumière de l’église Saint-Louis des Chartrons[20]. Des témoignages favorables à la restructuration du quartier ont été recueillis, montrant ainsi la satisfaction vis-à-vis des projets réalisés.

            Egalement, les mises en lumière sont l’occasion de mettre en place des inaugurations, qui sont toujours un bon vecteur de promotion de la politique de mise en lumière, avec le relais par la presse locale. Ainsi en a-t-il été par exemple du Grand Théâtre ou encore de la colonne des Girondins.

            Mais aussi les festivités de l’an 2000 ont été l’occasion de mettre en place un éclairage spécifique pour les cinq portes de la ville symbolisant aussi celles de l’entrée vers un nouveau millénaire, avec le concours d’étudiants des Beaux-Arts. “ Les cinq portes ne sont plus seulement des éléments du décor urbain ; dans la perspective de l’an 2000, elles deviennent un symbole de passage et, à ce titre, actrices de la nuit ” : voilà ce qui a été présenté dans le journal Sud-Ouest les 21 et 24 décembre 1999, présentant les thèmes des cinq illuminations.

            Ainsi donc, comme le dit Denis Mollat, “ Ces fêtes sont des symboles. On pensait que les Bordelais ne savaient pas s’amuser! ”[21]. Et ceci suffit pour faire comprendre ce qui fait l’intérêt de ses fêtes, devant le panorama d’une ville enfin éclairée, donc enfin revisitée et redécouverte.

 

2. La redécouverte du patrimoine pour rendre la ville plus agréable et pour séduire les habitants.

            Cette création d’une ambiance nocturne promue permet de donner un cadre nouveau à la ville, un cadre agréable. Les Français aspirent en effet à une nouvelle conception de l’univers urbain, avec une meilleure qualité de vie avec des avantages pour les piétons, les vélos ou encore les rollers au détriment de la voiture[22]. Mais aussi les citadins de notre pays souhaitent en priorité améliorer la sécurité (41%), avant de développer les animations culturelles, sportives les fêtes dans le centre-ville (33%) et dans les différents quartiers (27%)10. Or c’est précisément la contribution de la lumière que de mettre en pratique tout ceci. Toutefois, cela ne doit pas se faire au détriment d’autres revendications, car les citadins aspirent à la présence de commerces de proximité. A noter qu’une minorité d’un quart souhaite conserver la place vouée à la voiture, et donc une grosse majorité des personnes aspire à une amélioration de l’environnement : la qualité de vie citadine prend d’ailleurs le pas sur le confort individuel.

            Mais un sondage effectué par l’Association des grandes enseignes des rues piétonnières de Bordeaux[23], et révèle les indicateurs qui peuvent inciter les populations à fréquenter le centre-ville: outre la diversité des commerçants (78%) et les loisirs (39,3%), l’ambiance (23,7%) et le cadre agréable (17,3%) sont des critères assez fréquemment cités. Or le Plan lumière contribue à la réalisation de ces critères: il peut à ce titre être considéré comme une opération séduction pour les Bordelais et pour les autres. D’ailleurs, par exemple les jeunes ne s’y  trompent pas, redécouvrant les quais ou la place de la Victoire pour les soirées estudiantines.

 

            Ceci peut être interprété par le fait que l’intérêt des populations ces dernières années porte sur la réhabilitation du patrimoine ainsi que sur un certain engouement pour les manifestations festivalières. Retracer l’histoire, notamment dans un cadre dynamique n’est jamais neutre, car cela permet de fédérer la population ou encore de la faire reconnaître à l’extérieur. L’anthropologue Issac Chiva[24] reconnaît que “ C’est maintenant que l’on voit les effets de la décentralisation (…) Ce retour au local, au passé, au symbolique, est quelque close d’aussi novateur que le tourisme. Le politique symbolique a toujours été incarné par Paris. Désormais, c’est la culture, donc aussi l’histoire, qui est devenue un enjeu politique, social et économique. L’histoire (...) satisfait le besoin de donner de la visibilité, de dire que l’on fait quelque chose ”. Utiliser le passé pour préparer le futur, le politique symbolique, voilà bien ce qui est promu avec le Plan lumière. Aller à la quête des origines pour fédérer la population, faciliter l’intégration sociale et renforcer la cohésion identitaire, ceci est ainsi réalisé de manière plus rapide qu’avec la mise en place des grosses réalisations.

            Or Bordeaux est une ville avec un patrimoine très important, avec l’un des plus grands secteurs sauvegardés de France, existant depuis 1962. Certaines contraintes impliquent des réhabilitations. Mais il existe un protocole patrimoine symbolique, électoral car il fait plaisir et donne de l’importance, il accompagne les autres actions voire les rend plus évidentes, et permet de révéler des choses.

            L’intérêt est donc incontestablement de faire plaisir à tout le monde, tant aux touristes qu’aux habitants, c’est à dire au tout public. Mais l’article du Monde du 6 juillet 1999, “ Alain Juppé veut réussir à Bordeaux pour oublier Paris ” montre toutefois que le maire “ est revenu avec ostentation et fait une politique très populiste en prévision des prochaines municipales ”, pour reprendre les propos de Gilles Savary. De plus l’on parle de “ gestion paillettes ”, sans critiquer le bien-fondé de cette politique.

 

            Le Plan lumière est un symbole esthétique, social, lié à la vie de tous les jours. Un bâtiment bien éclairé apporte de la sécurité en plus de son esthétique car il est mis en valeur, entretenu, non abandonné ou mis à l’oubli. Parallèlement, une politique d’embellissement et de lutte contre les dégradations peut permettre d’amplifier encore plus ceci. L’intérêt est de donner une impression de donner une nuit plus sûre, notamment dans les lieux de vie, cadres des sorties étudiantes notamment. Les habitants sont de plus très heureux de voir le bâtiment de leur quartier mis en valeur (comme la maison cantonale par exemple, ou encore la cité jardin Claveau). Mais la ville est un ensemble de quartiers également : ici entre en compte toutefois une autre considération.

 

            Ainsi, la cohérence prend forme et permet donc de donner à voir les réalisations futures : la redécouverte de la ville se fait donc de façon très progressive. La nouvelle image semble donc réconcilier les habitants avec leur ville : le Plan lumière participe à ceci avec les autres politiques liées au. Et ceci est d’autant plus accru qu’il existe les animations mises en place permettent de “ pratiquer ” la ville, qui cherche à retrouver son rang de grande ville française, et même européenne.

3. La reconnaissance de la réussite de la réhabilitation du patrimoine par la lumière.

            Dès 1996, Bordeaux a lancé son vaste programme patrimonial dans l’objectif de favoriser le rayonnement de la ville et de faire de Bordeaux une ville de référence en matière de mise en valeur et de respect du patrimoine dans un contexte de développement de Projet urbain. Ceci s’est fait par le ravalement de la façade des quais, mais aussi par la mise en œuvre du Plan lumière comme témoignage symbolique des vastes chantiers qui s’annoncent.

            Mais trois ans plus tard, la reconnaissance de l’entreprise dans laquelle s’est investie Bordeaux semble avoir été faite. La consécration a été l’accueil du colloque “ Patrimoine et lumière ” les 8 et 9 septembre 1999 au “ capcMusée ”, avec des rencontres sur “ la lumière et le sensible ”, “ l’homme scénographe de ses nuits ” ou encore “ les lumières au service de la ville ” auxquelles ont participé des philosophes, des architectes, le concepteur lumière Roger Narboni, des réalisateurs de mises en lumière, la déléguée régionale EDF ou encore des designers, mais aussi avec des visites de sites bordelais ayant fait l’objet de mises en lumière. Ce colloque est organisée par l’association Renaissance des cités d’Europe qui anime aussi les nuits du patrimoine. nous révèlent que Durant ce colloque des réserves ont été émises[25], notamment par M. Narboni, quant au risque de voir un excès d’illuminations qui pourrait entraîner “ une banalisation et une perte d’émotion ”, ajoutant que “ nous sommes les champions du monde des illuminations ”. Pour lui, il faut trouver “ la troisième voie entre l’illumination paquet cadeau et l’œuvre d’art déconnectée de la réalité ”. Car il faut bien être conscient qu’un tel outil est sûrement limité et souffre de certaines faiblesses. Toutefois, Bordeaux n’a pas risqué une illumination trop rapide en se donnant vingt mois de réflexion, et cela avec un budget raisonnable. Et enfin il a rajouté que pour lui l’éclairage peut permettre de très nombreuses retombées, non seulement au niveau symbolique et patrimonial comme nous l’avons vu, mais aussi comme en étant une véritable politique annexe: certes le Plan lumière permet d’apporter aux décideurs publics, mais aussi au-delà à la ville.

 

 

Section II : Une véritable politique annexe

 

            L’élaboration du Plan lumière s’inscrit avant tout dans la politique générale de la ville de Bordeaux en matière d’urbanisme, dont les grandes lignes consistent à développer son dynamisme en réorganisant les quartiers en difficulté, en revitalisant son centre, en réaménageant ses deux rives pour les rendre plus accessibles et plus conviviales, mais aussi pour mettre en valeur le patrimoine architectural et urbain. En effet, le SDAL tient avant tout compte du Projet urbain. La volonté est de mettre en œuvre une stratégie nocturne globale pour développer dans la ville un éclairage urbain de qualité et une image nocturne novatrice et attractive à la hauteur des ambitions affichées. L’on cherche donc à dépasser l’évident aspect symbolique.

            Car si le Plan lumière semble être comme un “ artefact ” déclencheur d’une prise de conscience de la part des citoyens du changement opéré ou plutôt de la volonté de changement qu’opère la nouvelle municipalité, il est vraisemblable qu’il serve d’appui aux autres grandes mesures du Projet urbain (Bacalan-Bastide-Belcier, le franchissement du fleuve, l’aménagement des quais rive gauche,…), et préfigure ainsi une nouvelle conception de la ville. Ceci passera toutefois par la nécessité de se dégager des éventuelles considérations symboliques pour assurer véritablement l’intérêt à accorder comme politique annexe, surtout lorsque la dimension voirie aura plus de considération. Car il ne faut pas oublier que derrière les façades du XVIIIème siècle somptueusement illuminées, il y a un taux de chômage supérieur à la moyenne nationale, des secteurs de la ville à reconsidérer, une rive droite à l’état de friche, des logements inoccupés. Le Plan lumière doit donc accompagner les autres réalisations du Projet urbain pour ce qui est de la lisibilité et du fonctionnement de la ville, pour permettre d’exploiter l’embellissement de la ville et le nouveau “ standing ” apporté.

 

A/ La lisibilité et le re-dimensionnement de la ville.

 

            Il convient de préciser que l’ambition opérée par l’étude de la mise en place du Plan lumière était de permettre de redécouvrir les lieux de vie ainsi que de structurer et hiérarchiser la ville (en créant une armature urbaine) en plus du motif de sécurité. Il existe donc des aspects patrimoniaux, identitaires, et nécessaires pour dégager des potentiels revendiqués par un attachement de plus en plus important à l’aspect nocturne.

            Ainsi il est considéré comme un projet de long terme dans le cadre de lisibilité et de re-dimensionnement de la ville car il est l’un des éléments nécessaires dans des projets de réhabilitation mais aussi car il permet de prolonger la conception du Projet urbain dans une perspective de nuit, ce qui offre ainsi de nouvelles possibilités.

1. L’aspect nécessaire de l’inscription du Plan lumière dans d’autres projets de réhabilitation.

            A l’intérieur du Projet urbain, le Plan lumière est une des actions d’incitation, rapide car réalisable sur un temps court. L’on réserve des crédits, et l’on effectue des réalisations selon un calendrier envisagé, et au bout de cinq ans le projet prendra toute sa cohérence : ceci laisse plus de temps pour préparer les autres dossiers, nous l’avons vu, mais aussi les mises en lumière de bâtiments ou de voies accompagnent les autres actions. Car si le Plan lumière est le moyen le plus simple pour donner à comprendre la ville de demain envisagée dans le Projet urbain, préfigurant et donnant à voir, il est comme une grille de lecture : il est plus général, et s’intègre naturellement dans les autres projets.

a. La réhabilitation de certains quartiers dans un but de ré appropriation et de requalification.

            Ainsi, pour ce qui est de la réorganisation des quartiers en difficulté, on peut prendre l’exemple du quartier Saint-Michel[26], où une OPAH (opération d’amélioration de l’habitat) a été mise en place, afin de limiter un taux de vacance des logements devenu trop fort, créant ainsi un déséquilibre de population, ainsi qu’une surpopulation étudiante. Ainsi envisage-t-on des actions structurantes pour re-dynamiser le quartier urbain. Outre la réalisation de réhabilitation des logements qui se mettent en place, des ravalements de façades ainsi que le Plan lumière peuvent permettre de donner une autre allure au quartier, repéré et identifié par la flèche Saint-Michel. La qualité de vie pourra donc être accrue, verra-t-on peut-être une augmentation de la valeur locative des logements, un changement de l’habitat, un nouvel attrait de certains, car l’environnement est un facteur attractif. Ainsi ce qui pourrait apparaître comme symbolique permet de mettre en avant des atouts ainsi que des potentialités révélant la bonne intégration du quartier dans la ville au travers de la lisibilité des grands axes, donc le renouvellement du quartier, tout en assurant plus de sécurité et de qualité de vie.

            Le projet urbain accorde une place importante à l’environnement et à la qualité de la vie urbaine. Mais outre le développement de la ville qui doit se faire autour du fleuve, la requalification du quartier Saint-Michel et la restructuration des Capucins doit aussi s’opérer. Et dans l’ensemble des divers projets de développement du quartier est prise ne compte la mise en valeur de monuments religieux et de sites pittoresques, notamment par des mises en lumière, ou des ravalements, mais aussi la requalification de nombreuses voies. Un problème d’espaces publics dévalorisés handicape entre autres le quartier, mais il joue de potentialités qu’il s’agit de développer, de par sa vitalité ou sa jeunesse. C’est le but de ces politiques : le fait de faire fréquenter le quartier par des populations non-résidentes peut contribuer à son développement.

 

            Mais d’autre part, la politique de réhabilitation du quartier Saint-Eloi[27], déshérité au regard de la fermeture de nombreux commerces, est très intéressante dans cet aspect de réhabilitation en vue d’une ré-appropriation du quartier. Pour redonner une identité à la rue Saint-James, l’on cherche à redonner un certain dynamisme en favorisant le retour d’une certaine activité économique. Mais également une opération de piétonisation est mise en place, pour profiter du monument touristique qu’est la Grosse Cloche, ainsi qu’un mini-plan lumière, parallèlement avec des animations comme la Fête de l’automne et des vendanges. Ce programme montre comment la lumière peut être présente lorsqu’il s’agit de montrer l’action municipale dans une politique plus globale. Et même il est difficilement quantifiable mais possible que la mise en lumière crée une plus value sur les logements ou les commerces.

 

            Il n’y a pas qu’un élément de curiosité, mais un niveau social faisant en sorte que les gens puissent redécouvrir leur ville par la lumière. Par exemple, la place du Palais Gallien a été sans lumière car elle était en mauvais état. Un effort a été fait, ce qui a permis un accompagnement des réalisations. On peut donc interpréter ceci comme une ré-appropriation des places. Car en effet la lumière est aussi importante que le pavage, les commodités, les éléments du mobilier urbain, ainsi que la netteté et la propreté dans la qualité de vie et dans l’aménagement de l’espace.

b. Le cadre de la cohérence du Projet urbain global pour une nouvelle pratique de la ville.

            Mais aussi, une grande importance est accordée aux grandes structurantes, aux agrafes, aux entrées de ville, ainsi qu’à l’aspect patrimonial (pour les principaux bâtiments et les sites classés). Dans la trame que dessineront les voies éclairées on voudra mettre en place un élément d’interconnexion, une liaison dont l’élément nocturne se fera par la lumière : il s’agit du parcours patrimonial, dont la logique est semblable à celle d’une promenade proposée au travers de certains lieux choisis du patrimoine bordelais afin de redécouvrir la ville, au-delà du secteur piéton : ceci va de pair avec la diminution de la place de la voiture dans la ville, et pourra permettre de redécouvrir la ville d’hier à demain au travers des différentes périodes, dans ses différentes identités, et donc d’en découvrir une autre dimension nocturne.

Egalement, l’arrivée du tramway pourra donc permettre de revaloriser la “ pratique ” de la ville par les piétons mais aussi par les cyclistes, et poursuivre un peu plus le changement d’image dans la compétition avec les autres villes la qualité de vie est sûrement améliorée, et la ré-appropriation tout comme la découverte notamment nocturne favorisée. Le centre va donc être peu à peu réinvesti, les obstacles gênant sa fréquentation comme les problèmes liés à l’automobile s’étant atténués, pour peu que des commerces et des activités diverses y prennent place et y soient maintenus. La lumière est donc l’un des éléments de la convivialité.

            Ainsi, l’action va de pair avec d’autres politiques liées à la réhabilitation du patrimoine, à l’embellissement, mais aussi dans le cadre d’autres mesures, afin de permettre de “ penser ” la ville non seulement le jour, mais aussi la nuit.

2. L’aspect qualitatif d’une perspective de la ville et des quartiers dans une vision complémentaire de nuit.

            Le Plan lumière fait véritablement partie du Projet urbain, il n’est pas un appendice. Et il s’agit même de l’un des axes forts de cette politique de la ville car il annonce le plus. En effet, comme me l’a précisé M. Crombé, il existe deux axes de développement: un axe nord - sud-est (représenté notamment par le tramway dont le parcours se superpose avec les lignes de force présentées par le Projet urbain et soulignées par le Plan lumière ), ainsi qu’un axe nord-sud représenté par la Garonne que l’on cherche à franchir.

            L’idée forte est que la ville existe la nuit et est appréhendée de façon différente, car elle se lit et commence à s’apprécier la nuit. Ceci est assez nouveau.

            A Bordeaux l’on essaye de redonner un fil conducteur, et d’envisager de la diversité dans la cohérence. On cherche à rattacher les mises en lumière à l’histoire et au patrimoine, d’autant plus que la procédure de mise en lumière de chacun des bâtiments est appréhendée en fonction de son sens, de son histoire. Et la mise en lumière de la voirie va pouvoir permettre de donner une nouvelle vision de la ville. On aimerait certes que les promeneurs, les visiteurs, les habitants puissent redécouvrir les nombreuses richesses que constitue le patrimoine architectural bordelais de nuit, grâce à la mise en place du Plan lumière. Par exemple, la base sous-marine, lieu chargé d’Histoire, va se voir attribuer de nouvelles fonctions, et une mise en lumière a été décidée pour ce lieu très emblématique. Il en est de même pour les bassins à flot, qui représentent une zone très sombre. Le pari serait ainsi de redécouvrir ces lieux, et d’en faire de nouveaux pôles d’attraction, ce qui permettrait par ailleurs d’assurer la continuité avec le quartier Bacalan.

            Le Plan lumière n’est donc pas limité à une zone centrale de la ville, et offrent donc la possibilité de mettre en valeur d’autres quartiers. Ainsi les mises en lumière pourraient-elles permettre de redécouvrir la cité jardin Claveau, dont la mise en lumière a été faite très étroitement en relation avec la population. Car chaque quartier, chaque site ayant ses éléments intéressants, pouvoir contribuer à rassembler les individus serait quelque chose de très intéressant. Les mises en lumière pourraient ainsi contribuer à créer un référentiel pour les quartiers, avec peut-être un sentiment de fierté que l’on veut donne, en somme un peu comme un “ esprit de clocher ”. Mais quant à savoir si le Plan lumière va plutôt faire en sorte de donner une identité propre à la ville ou de voir une juxtaposition de quartiers à Bordeaux, il est possible de voir les deux car il existe une unité surtout vers le centre, marquée d’autre part par des quartiers avec une plus forte personnalité (comme Caudéran ou la Bastide qui est un lieu un peu singulier)[28]. Il existe donc une unité dans la diversité et la complexité surtout dans le triangle entre Saint-Michel, la Bastide et Saint-Louis. Mais on veut aller vers une cohérence d’ensemble. Le Plan lumière pourra donc se concilier avec un projet comme le tramway pour limiter le phénomène de périphéries désormais mieux desservies par les transports en commun plus conviviaux et plus pratiques. Comme la ville ne saurait être artificielle, réunir les quartiers contribuerait à leur propre renforcement mais aussi à l’unité d’ensemble.

            Pour ce qui est des quais, ayant un aspect identitaire pour Bordeaux, il s’agit d’un grand enjeu pour demain. Occupés jadis par l’activité portuaire, en mauvais état, aujourd’hui occupés par la circulation automobile, la reconversion de ces quais est en cours. Ils seront aménagés avec la création de promenades que l’on veut valoriser par l’éclairage nocturne, la création d’un pôle d’activités diverses (le salon du livre, la fête du fleuve,...) mais aussi une vue panoramique depuis l’autre rive, dégagée des bâtiments des anciennes activités portuaires, peut permettre de revitaliser la zone. Le Plan lumière est donc ici comme une politique d’appoint favorisant l’ouverture de la ville vers le fleuve avec l’illumination des façades, permettant une réhabilitation ainsi qu’une requalification par la mise en place de diverses activités, et les mises en lumière doivent être assez importantes pour pouvoir les intégrer dans le plan d’ensemble des pistes cyclables, de la voirie et des maisons. Et d’autre part on effectue une redéfinition importante ainsi qu’un conditionnement de l’habitat dans cette zone. Mais quelle que soit la requalification des quais, la lumière comme outil complémentaire s’adaptera en cohérence avec les nouvelles définitions et permettra de compléter dans un cadre agréable les aménagements en proposant de poursuivre une activité nocturne dans une atmosphère différente. Car si dans les rues il existe un dimensionnement de la lumière, il existe sur les quais une marge de manœuvre pour toujours favoriser à gré les nouvelles réalisations, notamment par rapport à l’importance que l’on veut donner à l’aménagement de la zone du fleuve, toujours propice à différentes manifestations. Mais Michel Corajoud[29], qui considère beaucoup la lumière, juge qu’aujourd’hui elle est trop brutale, c’est-à-dire trop encore trop symbolique. Ainsi dans le projet elle sera recadrée avec les autres éléments. Les mises en lumière des bâtiments puis des voies permettront donc une meilleure lisibilité de la ville pour promouvoir ce site dans le cadre du Projet urbain.

L’éclairage public est ainsi un élément très précoce mais un élément comme les autres dessinant la ville de nuit. L’occasion de repenser ainsi la ville est indéniablement la marque de grands décideurs, pour une meilleure qualité de vie. La participation à un re-dimensionnement et à une nouvelle lisibilité de la ville se fait donc avec l’appui des autre éléments du Projet urbain, dans le but d’une plus grande attention vis-à-vis des quartiers périphériques, mais aussi par rapport à d’autres dimensions liées à la qualité de vie, à la sécurité, à la redécouverte de la Garonne, ou au retour d’une certaine population vers le centre-ville. Mais aussi le Plan lumière dispose d’une certaine autonomie dans le Projet urbain. Il est donc incontestablement comme un “ plus ” dont on ne saurait se passer.

            On tente donc aussi d’appuyer les politiques qui évitent les déplacements de lieu de résidence en fonction du revenu, ainsi que l’étalement. La reconquête des centres est aujourd’hui un enjeu important de la politique de la ville. Le standing et l’embellissement peuvent donc être des possibilités pour favoriser ceci.

 

B/ Le standing et l’embellissement.

 

            Si l’arrivée du tramway pourra faire incontestablement de Bordeaux une ville plus pratique, le Plan lumière fait partie de ces mesures qui contribuent à l’embellissement de la ville, avec les espaces verts par exemple, lui assurant un certain standing comme les réalisations se font en accord avec les autres services concernés par les aménagements de voirie.

            Ainsi ceci pourra permettre une certaine qualité de vie, et cela passe par un accroissement du nombre de rues piétonnes, des places, par la rénovation urbaine, par la mise en valeur du patrimoine. Mais nous allons nous intéresser à ce que la qualité de vie, le prestige, peuvent apporter à la ville. Car le Plan lumière est l’occasion d’offrir toute une palette d’outils permettant d’exploiter ce développement du standing de Bordeaux. L’amélioration du patrimoine, la mise en place du parcours patrimonial, peuvent constituer un outil publicitaire permettant de donner une dimension jusque là inconnue à Bordeaux. Ainsi le Plan lumière ne profitera non seulement à la population mais également aux étrangers par le tourisme, le commerce, l’installation d’entreprises, favorisés par le dynamisme de la ville.

 

1. Vers une politique touristique.

            Avec le tourisme, l’on rejoint un aspect économique, par la valorisation de ses atouts, le dynamisme, la culture, valorisant les équipements intéressants. Ainsi, quand l’image est bonne, l’expression est bonne car l’on montre outre que l’on peut rivaliser avec d’autres agglomérations importantes par la valorisation de ses propres atouts. C’est par l’ambiance festive qu’il crée, qu’un bel éclairage dans les rues est un acteur de promotion du tourisme et bien sûr du commerce local. C’est donc à long terme et par d’autres mesures que le simple fait d’éclairer qu’il semble que les mises en lumière peuvent montrer que l’aspect embellissement de ses propres atouts peut être utilisé au niveau économique. Car comme Bordeaux est une ville de référence en Europe pour la richesse et l’unité de son architecture classique et néoclassique des XVIIIe et XIXe siècles, le développement touristique est justifié à ce titre.

            L’Office du Tourisme est présidée par le premier adjoint au maire, et a une délégation de la ville pour la gestion de la politique touristique de la ville, l’action se faisant de façon concertée, et a donc la possibilité de jouer sur cet élément pour favoriser certains éléments.

            Ainsi, l’activité touristique est assez importante à Bordeaux : en août en moyenne 3000 touristes visitent quotidiennement la ville. Il faut en outre constater qu’il existe une évolution vers un tourisme plus culturel. La saison touristique estivale a montré que de nombreuses personnes ont quitté le littoral afin de découvrir Bordeaux (le Colbert étant le site le plus visité) et notamment ses musées et monuments[30]

            En effet, l’année 1980 était consacrée au patrimoine : une sensibilité s’est créée, avec les classements de monuments historiques, et avec cela de la notion de patrimoine. Et l’intérêt pour le patrimoine est allé croissant avec les journées qui lui sont consacrées et qui connaissent un franc succès. Ainsi, ce dernier doit être entretenu, et ceci sera d’autant plus légitime qu’il y aura une reconnaissance “ officialisée ” effectuée par des mises en lumière, insérée dans un cadre institutionnel, dans la communication de la ville. Car plus que de montrer une volonté politique de vouloir re dynamiser la ville, l’on cherche à faire en sorte que les Bordelais revisitent leur ville. Mais étant donnée l’importance du tourisme aujourd’hui en France, il s’agit pour Bordeaux de jouer sur la notoriété et l’efficacité, en dehors des seuls habitants : ainsi l’embellissement et donc la redécouverte du patrimoine sont des éléments incontournables. L’Office du Tourisme étant le lieu de référence pour le touriste, il joue sur l’image, en matière de réputation ou de patrimoine : car Bordeaux est la deuxième ville la plus connue de France après Paris. Pour ce qui est de l’aspect patrimonial, son entretien est important, de même que sa valorisation outre par les mises en lumière, par des brochures ou des animations son et lumière. Il s’agit de faire exprimer le passé dans le temps où l’on se trouve, car les fonctions d’origine de ces bâtiments ont disparu. L’adaptation s’est faite en créant des expositions dans les monuments. Mais aussi certains monuments avec peu d’intérêt le jour, ils peuvent avoir un certain intérêt la nuit.

            Ainsi cette préoccupation de l’esthétique remonte aux années 1980 en même temps que l’intérêt pour le tourisme patrimonial. L’impact se fera donc au moyen d’outils de communication et de circuits lumière basés autour des mises en lumière, ou par le parcours patrimonial, qui permet d’établir une vision transversale faisant remonter les époques : il y a donc des incitations pour aller plus loin dans l’exploitation touristique, jusqu’à même faire redécouvrir la ville aux Bordelais. Il y a donc un sentiment important, une estime qui se développe, vis à vis de la mémoire de la ville, dont on cherche par ailleurs à réconcilier les différentes. Un travail a donc été effectué sur l’amélioration du cadre de vie, sur la mise en valeur du patrimoine de la ville plus particulièrement sur le secteur sauvegardé, et ce afin de faire une découverte originale de la ville autour des principaux monuments, avec une ambiance différente selon qu’il s’agisse du jour ou de la nuit. Le secteur concerné est celui allant du Palais de justice à la place de la Bourse, sur des lieux propices à la découverte et au repos. Evoquant le patrimoine, mis en place par une action officielle, financé en partie par l’Etat, le parcours patrimonial est donc un élément touristique pour Bordeaux des plus importants car l’on attend beaucoup de lui.

            Toutefois, les mises en lumière sont également parfois rendues nécessaires. Par exemple, Bordeaux n’a pas de musée du vin : l’on peut pallier à cela par la mise en place des évènements lumière dans le cadre d’une découverte des éléments du patrimoine souvent privé qui l’évoquent : la vision qui sera ainsi donnée ne sera perceptible que la nuit. La ville entière sera donc un peu comme un musée.

Les mises en lumière sont en effet nécessaires pour faire de Bordeaux une ville touristique, mais il faut aussi créer des animations pour pouvoir mettre en valeur. Ainsi en est-il de la Fête du fleuve à la suite de Vinexpo ou de la fête du vin à l’issue de la coupe du monde. Il existe donc une certaine alchimie à mettre en place, liée à l’image de dynamique.

            Il s’agit aussi de “ rebondir ” sur les évènements pour valoriser le patrimoine dans une perspective touristique. Par exemple, le classement par l’UNESCO de tous les sites liés au chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle fera mettre en valeur la basilique Saint-Seurin, la basilique Saint-Michel ou encore la cathédrale Saint-André... Il y a donc un lien à l’évènementiel pour la mise en place du Plan lumière.

            Un touriste peu renseigné se laissera guider par les animations nocturnes, ce qui lui permettre de faire une lecture non seulement des lieux les plus importants, de voir un cadre dans la lecture des différentes périodes historiques, mais aussi il pourra contempler la silhouette nocturne de Bordeaux depuis la rive droite.

            Ainsi, au départ, certes, ceci est toujours symbolique mais au fond il y a autre chose. Bordeaux est une ville qui a des possibilités en matière touristique. Si l’un des exemples les plus remarquables est essentiellement le rayonnement du musée Guggenheim à Bilbao permettant d’attirer vers la ville des personnes qui autrement n’avaient pas lieu de l’être tant les friches industrielles sont nombreuses et inesthétiques, Bordeaux dispose d’un patrimoine à valoriser fortement, issu de la richesse héritée du vin ainsi que des diverses autres caractéristiques ayant fait de la ville ce qu’elle est aujourd’hui dans le tourisme, qui est aussi une caractéristique économique. Or ce tourisme vient d’une demande de vacances culturelles. Et la nécessaire présence d’infrastructures destinées à accueillir les touristes semble être une réponse à cette attente.

            D’autre part, il s’avère que le retour de grands bateaux tels le Queen Elisabeth s’amarrant en face de la place de la Bourse détermine la vocation qu’a Bordeaux pour restaurer la grandeur de ses monuments, mais aussi de sa réputation, et ainsi restituer tout son prestige.[31]

 

2. L’aspect économique par la recherche d’investisseurs

            Le patrimoine et son image peuvent redonner une certaine importance et un certain intérêt extérieurs à la ville aussi liée à l’aspect économique lié à l’investissement, ou à des choix plus ou moins objectifs : une société dynamique va préférer une ville qui lui ressemble afin d’optimiser ses atouts, c’est-à-dire en choisissant une ville agréable, ce qui est rendu possible par la lumière[32], ainsi que des éléments pour que les gens puissent sortir et soient encouragés à le faire. Ainsi, les aménagements pourront profiter à la Bastide, qui pourra avoir tous les atouts de son côté. Mais il semble nécessaire d’accompagner avec des mesures incitatives, avec l’aide possible du service action économique. Et les aménagements profiteront également à toute l’agglomération dans ce domaine, ainsi même qu’à la région Aquitaine promue au travers de sa “ capitale ”: en témoignent les fonds européens perçus pour les réalisations.

            L’on a donc cherché à restructurer la ville afin qu’elle soit belle et liée à son patrimoine, c’est-à-dire donner un signal fort et une bonne impression de l’image, en fonction des atouts culturels et historiques, mais aussi fonctionnelle, ce qui prend beaucoup plus de temps.

Si des entreprises automobiles ou aérospatiales se sont implantées, il faut en tout cas que Bordeaux puisse attirer les investisseurs afin de réduire le chômage, dont le taux est plus important que celui relevé au niveau national : or cela peut passer par des campagnes de promotion, notamment utilisées par l’image. Bordeaux est une métropole d’équilibre, une ville de rang international: la question de concurrence entre les villes est donc assez importante. Mais en tout cas, la grande ambition pour Bordeaux est d’être la grande ville du Sud Ouest, et donc la ville veut opérer une remise à niveau par rapport aux grandes rivales que peuvent être Toulouse ou Montpellier, et d’amorcer peut être même l’épanouissement de l’Arc Atlantique en renforçant sa position, dont l’image porteuse et l’accueil de nouveaux investisseurs sont un passage obligé

 

            Or pour l’image il est question de re-dynamiser le centre, lieu qui a l’identité la plus forte, car étant historique. Des aménités pour reconquérir le centre, peuvent favoriser l’implantation des entreprises. En effet, la vie culturelle est comme le complément d’une activité économique. Bordeaux est une ville ancienne mais aussi moderne, d’envergure européenne : voilà qui peut être un élément pour aller dans le but recherché. Il s’agit de montrer, de désigner, de révéler l’importance, de dissimuler peut-être certains retards mais en jouant sur ses atouts: la lumière peut donc permettre de hiérarchiser, de donner à voir, et donc elle permet une certaine latitude quant à l’image que l’on veut donner. Et cette image semble être porteuse puisque Bordeaux accueille les sièges régionaux de plusieurs grandes entreprises.

            Le Plan lumière participe donc entre autres à des fonctions destinées à l’aménagement du territoire (pour la Gare d’Orléans, la réhabilitation ainsi que la mise en lumière de nuit la rendant incontournable à permis l’installation d’un cinéma profitant à la rive droite), du fait que l’on cherche à promouvoir l’installation de nouvelles activités notamment, en plus de rééquilibrer la croissance urbaine.

 

3. La reconquête des centres pour l’habitat.

            En offrant des espaces accueillants, un cadre de vie agréable, incontestablement l’on peut voir un retour de population, par la renaissance de quartiers comme les Chartrons, la naissance de quartiers comme la Bastide, ou la redécouverte de quartiers comme Saint-Michel. Or nous avons vu que le Plan lumière a contribué à re dynamiser ces quartiers.

            Les conditions sont agréables aux gens désireux de s’installer, d’autant plus que l’accompagnement d’équipements collectifs de qualité (lycées, bibliothèques, commerces,…) est suffisant, ce qui a un effet bénéfique. Ainsi la Place Camille Jullian, par exemple, ravalée et mise en lumière, permet de la rendre plus conviviale, de même pour la place du Parlement : la beauté de jour, l’éclairage de nuit permettent de les redécouvrir, d’autant plus que des activités économiques commencent à s’y installer. Un cachet inimitable pour Bordeaux centre, avec la redécouverte du patrimoine, a permis de relancer l’immobilier[33]. Mais toutefois l’arrivée du tramway pourra apporter encore une meilleure qualité de vie.

 

 

            Les impacts de la lumière sont donc multiples, symboliques au début mais efficaces par la suite. L’enjeu est donc bien la ré-appropriation des lieux publics dans un premier temps, la redécouverte du patrimoine dans un second temps, ce qui crée une ambiance et une cohérence donnant au Plan lumière un vrai statut de politique annexe.


CONCLUSION

 

            La lumière est ainsi avant tout considérable comme un élément d’un tout, dans le Projet urbain.

            Mais aussi cette entreprise doit être reliée avec l’importance de la médiatisation et du fait qu’il s’agisse de l’un des dossiers prioritaires du maire, peut être aussi car les acteurs ont à mes yeux pris plaisir à travailler sur ces dossiers, ce qui ne peut qu’entraîner des conséquences favorables pour la réussite de l’entreprise. Au fil des découvertes, un véritable engouement s’est créé. Peut-être que ce “ dépoussiérage ” de Bordeaux, ce réveil de la ville, accompagné par d’autres mesures patrimoniales destinées à redécouvrir le centre et à inciter la population à revenir vers le centre, tout en limitant les voitures, permettra de changer non seulement l’image de la ville pour ses habitants, mais aussi avec la mise en place véritable du Projet urbain la pratique de la ville. Car non seulement la ville pourra exister et avant tout vivre la nuit, la lumière participera à redécouvrir des lieux peu mis en valeur dans Bordeaux.

            Si l’aspect symbolique est évident, si l’utilisation participe aux autres dispositions du Projet urbain, l’on en connaît le coût, mais les retombées ne sont pas quantifiables, tant pour le tourisme, que pour les retombées d’installation, ou pour le développement de l’image qui flatte la population et incite à un développement. Il faudrait peut être également un accompagnement par d’autres villes de l’agglomération pour assurer une certaine continuité, ce qui passerait par un transfert des compétences en matière d’éclairage au profit de la communauté urbaine, d’autant plus que Mérignac a également procédé à la mise en place de son Plan lumière.

            Mais pour ce qui est de la réussite, il faut aussi un accompagnement par une nouvelle pratique de la ville de la part de la population. Une bonne impression, une nouvelle praticabilité de la ville, une qualité de vie inconnue jusque là sont des facteurs à prendre en compte. Et la séduction par l’éclat de festivités, Bordeaux s’inventant de nombreuses fêtes, la population trouvant de nouveaux goûts pour sortir et découvrir les réalisations, est l’atout pour pouvoir engager la confiance permettant à Bordeaux de “ changer de peau ”[34]).

            En effet, il ne faut pas que les mesures soient seulement artificielles, symboliques : tout doit être repensé dans la cohérence avec les autres éléments du Projet urbain pour que l’évolution de Bordeaux soit la plus achevée possible, soit réelle et pas seulement visible.

            Ainsi, poursuivre cette politique de mises en lumière tant des voies que des bâtiments est nécessaire, sans toutefois aller jusqu’à l’excès tant des réalisations que du coût financier. La reconduction du Plan lumière semble donc être nécessaire, mais toutefois le processus est sans fin, du fait que le concept change avec les modes ou les techniques, et que l’apparition de nouvelles normes européennes tend à déstabiliser. Mais toutefois, il semble qu’elle se fera toujours avec la même détermination, en tout cas jusqu’en 2001, date des prochaines élections municipales et à laquelle les électeurs ne manqueront pas de constater les avancées concrètes du Projet urbain de Bordeaux, à savoir pour ce qui les touche le plus, autrement dit la valorisation du patrimoine.

            Le retour de Bordeaux vers Bordeaux, du passé dans le présent pour préparer l’avenir, voilà le grand enseignement du Plan lumière.


 

ANNEXES

 

 

 

 

ANNEXE I : Extraits du Projet urbain de la ville de Bordeaux.

 

ANNEXE II : “ Eclairage public ”, extrait du Guide général de la voirie urbaine.

 

ANNEXE III : “ L’urbanisme lumière, une nouvelle dimension pour la ville ”, La lumière et la ville à la Défense, décembre 1991.

 

ANNEXE IV : - Introduction et sommaire du Schéma directeur d’aménagement lumière de la ville de Bordeaux.

                        - Quelques extraits du Schéma directeur d’aménagement lumière tels que publiés dans l’article “ Bordeaux, ville des lumières ” de Génie Urbain, novembre-décembre 1999, accompagnés de quelques croquis explicatifs.

 

ANNEXE V : Le calendrier des réalisations effectuées dans le cadre du Plan lumière de la ville de Bordeaux.

 

ANNEXE VI : Quelques images de réalisations, telles que présentées par Génie urbain, novembre-décembre 1999, ainsi que sous forme de cartes postales ou de photos.

 

ANNEXE VII : “ Une ville qui doit réapprendre à s’aimer ” et “ Bordeaux en panne ”, articles du Monde présentant Bordeaux avant l’arrivée d’Alain Juppé comme maire en 1995.

 

ANNEXE VIII : - “ Bordeaux, les premiers signes du réveil de la ‘Belle endormie’, Le Monde du 13                        juin 1998 

  - “ Bordeaux change de peau ”, Sud-Ouest Dimanche du 11 octobre 1998 

  - “ Bordeaux rattrape le temps perdu ”, Le Point du 21 janvier 2000.

Ces articles présentent Bordeaux et sa nouvelle image depuis l’arrivée d’Alain Juppé comme maire de la ville en 1995.

 

ANNEXE IX : - “ Patrimoine, la ville des lumières ”, Le Point du 21 janvier 2000 

- “ Grand Théâtre, le chantier lumineux ”, Sud-Ouest du 7 décembre 1999 

- “ L’an 2000 se porte bien ”, Sud-Ouest du 21 décembre 1999.

Ces articles présentent les réalisations du Plan lumière de la ville de Bordeaux.

 

ANNEXE X : “ Bordeaux en habit de lumière ”, Bordeaux Tourisme, janvier-février 1999.

 

ANNEXE XI : “ Quand Bordeaux réveille la nuit ”, extrait de la brochure Bordeaux, Plan lumière de l’office du tourisme de Bordeaux.


 

BIBLIOGRAPHIE

 

 

Ouvrages :

 

- La lumière urbaine, éclairer les espaces publics, Roger Narboni, Le Moniteur, collection technique de conception, Paris, 1995

 

- La lumière depuis la nuit des temps, ouvrage collectif, Autrement, 1991.

 

 

 

Catalogue d’exposition :

 

“ La lumière et la ville, nuits de ville, lumière d’un temps ”, exposition réalisée par l’EPAD à la Défense sous le commissariat général de Roger Narboni, Flammarion, Paris, 1991.

 

 

 

Documents, revues et presse :

 

- Les divers articles de journaux consacrés aux réalisations du Plan lumière publiés par Sud-Ouest.

 

- Les divers articles publiés par les quotidiens et hebdomadaires français consacrés à Bordeaux.

 

- Les diverses plaquettes et journaux d’information de la mairie de Bordeaux et de l’office du tourisme.

 

- “ La lumière dans la ville ”, dossier de Génie Urbain, novembre - décembre 1999.

 

- “ Bordeaux, un projet urbain global ”, article publié par Le Moniteur des travaux publics et du bâtiment, 25 octobre 1996.

 

-          Le Projet urbain de Bordeaux, le schéma directeur d’aménagement lumière, le Plan lumière et la Charte lumière de la ville.

 

 

Jérôme D
( courriel : jejeduc chez caramail.com )

 



[1] cf. Rapport de stage DESS IEP Les compétences communautaires en matière d’urbanisme, Astrid Naboulet.

[2] Le service de l’éclairage public est un service habituel des villes. A Bordeaux plus spécifiquement a été rajoutée la fonction de mises en lumière, correspondant à l’idée du maire de lancer le Plan lumière, par extension du service mais sans modification de la structure. En effet, chacun des techniciens était en charge des mises en lumière en fonction du quartier sur lequel il travaillait (Bastide et sud de la ville, centre-ville, Caudéran et nord de la ville). Mais actuellement, après le départ de M. Dulout, intervenu en septembre 1999 et donc après la période de stage, un nouveau directeur a restructuré de façon à ce que chacun des techniciens effectue un seul type d’opération sur l’ensemble du territoire de la ville de Bordeaux.

[3] Des extraits du Projet urbain sont présentés en annexe.

[4]  voir à ce titre les dispositions du Projet urbain.

[5] Voir à ce titre les annexes II et III présentant des caractéristiques de l’utilisation de la lumière dans la ville.

[6][6] cf. annexes.

[7] Nous reprenons ici les différents points développés par le document constituant la première partie du SDAL.

[8] Nous reprenons ici les différentes informations que constitue la seconde partie du SDAL, en épargnant toutefois le lecteur de certains aspects trop techniques. Toutefois, une présentation en est faite dans la revue Génie urbain, novembre - décembre 1999, dans l’article consacré au Plan lumière de la ville de Bordeaux, présentée en annexe.

[9] Cette citation est issue de la présentation de Projet urbain par le maire.

[10] Une présentation de ce calendrier établi est faite en annexes.

[11] En effet, la basilique est classée au patrimoine mondial de l’UNESCO au titre de son emplacement sur le Chemin de Saint-Jacques de Compostelle.

[12] Les différents acteurs concernés m’ont précisé ceci, l’ordre des opérations obéissant à des règles précises.

[13] Les concepteurs lumière sont tous des spécialistes de haut niveau. Il s’agit essentiellement de personnes qui viennent du spectacle, du cinéma ou de la musique,  mais également ce sont des ingénieurs, des artistes ou des architectes comme pour la Grosse Cloche ou la cité jardin Claveau). L’un des concepteurs lumière les plus connu est P. Bideau, qui a notamment réalisé la mise en lumière de la Tour Eiffel à Paris, mais aussi celle du Grand Théâtre à Bordeaux. Clair, Mathieu ou Kersalé sont aussi des concepteurs lumière renommés.

[14] Pour ce qui est des fournitures, il existe un appel d’offre spécifique, sauf pour certaines réalisations où il s’agit de “ fourni posé ”, à cause d’une contrainte d’accessibilité.

[15] La réalisation des travaux rencontre parfois certaines difficultés, ce qui a été notamment le cas pour le Pont de pierre où les réalisations ont dû être reconsidérées, avec en plus certaines difficultés pour réaliser concrètement les travaux (des alpinistes professionnels ont par exemple été nécessaires pour effectuer la pose des sources de lumière du Pont de pierre).

[16] Le Point du 21 janvier 2000

[17] Diagonal, mai juin 1998

[18] Voir les annexes VII et VIII montrant le contraste entre les gestions de la ville par les deux maires.

[19] L’on parlait au XIXème siècle de Bilbao comme ville lumière, là où les investissements français et anglais s’installaient dans cette région. Ville la mieux éclairée, la capitale de la Biscaye représentait un symbole de puissance et de modernisme. Si aujourd’hui elle a perdu de son attrait, celui-ci a été récupéré par l’installation du musée Guggenheim, joyau symbolique du renouveau et de l’identité nouvelle de la ville, qui a voulu se démarquer de son passé industriel entré en déclin. Et le rebondissement a été un succès, d’autant plus que Bilbao était aussi un vieux port

[20] cf. article du journal Sud-Ouest du 20 septembre 1999 consacré à ce sujet dans les pages “ Bordeaux ”, présenté dans l’annexe IX..

[21] cf. article du Nouvel Observateur consacré à la ville de Bordeaux.

[22]cf. article du Monde du 23 juin 1999.

[23] Ce sondage a été publié par le journal Sud-Ouest Dimanche le 7 novembre 1999

[24] cf.article du Monde, du 30 octobre 1998 “ L’histoire locale, nouveau ciment de la vie collective ”

[25] cf. articles publiés par Sud-Ouest les 9 et 10 septembre 1999

[26] des renseignements plus précis sont présentés par une étude de l’agence d’urbanisme, “ Capucins, Saint-Michel : un marché à transformer, un quartier à requalifier ”.

[27] cf. le journal Sud-Ouest du 23 septembre 1999

[28] Cette réflexion est telle qu’affirmée par M. Dulout.

[29] Il s’agit de l’architecte qui a gagné le concours de maîtrise d’œuvre d’aménagement des quais de Bordeaux Rive Gauche de la Garonne. Ses affirmations sont issues d’un entretien publié dans le magazine de la communauté urbaine de Bordeaux en février 2000, “ les quais: un lieu de vie exceptionnel en bordure de Garonne ”.

[30] cf. Sud-Ouest du 8 septembre 1999.

[31] La plupart de ces renseignements m’ont été présentés par MM. Kamlay et Prévôt de l’office du tourisme de Bordeaux suite à un entretien. Egalement, voir les annexes X et XI consacrées à l’utilisation du Plan lumière comme élément touristique.

[32] A ce titre une plaquette a été destinée aux entrepreneurs afin de les inciter à s’installer dans l’agglomération bordelaise, “ Bordeaux, laissez-vous séduire ”.

[33] Un supplément immobilier publié par Sud-Ouest en mars 2000 en atteste clairement.

[34] cf. Sud-Ouest du 11/10/1998